Page:Trevoux - Dictionnaire, 1721, T01, A.djvu/62

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
69
70
ACC ACC


pesanteur qui fait l’accélération du mouvement des corps dans leur chûte, car on a remarqué qu’un poids d’une livre tombe & descend avec la même vîtesse qu’un poids de cent livres. Bern. Supposant qu’à la même distance du centre de la terre la gravité agit uniformément sur tous les corps, & que le temps qu’un corps met à descendre soit divisé en parties toutes égales ; si après que le grave par son poids est tombé vers le centre de la terre pendant la première de ces parties de temps, sa gravité cesse d’agir. Ce corps tombera également, avec une vîtesse égale à la force de la première impulsion, c’est-à-dire, que pendant chacune de ces parties de temps, il ne parcourra qu’autant d’espace qu’il en a parcouru pendant la première : sa gravité donc ne cessant point, mais agissant toujours, il s’ensuit qu’au second moment ce corps recevra une nouvelle impulsion pour descendre ; sa vîtesse sera donc double de ce qu’elle étoit au premier moment, elle sera triple au troisième, quadruple au quatrième, & ainsi des autres. Par conséquent les vîtesses dans l’accélération sont comme le temps. De plus, parce que l’espace que décrit un mobile dans un temps donné avec une vîtesse donnée, est le rectangle fait du temps & de la vîtesse, un corps grave étant également & uniformément accéléré, l’espace qu’il décrit au commencement du temps de son mouvement, est justement la moitié de celui qu’il auroit décrit, si dans le même temps il s’étoit mû avec une vîtesse égale à celle qu’il a en finissant. De-là il s’ensuit, 1°. Que l’espace parcouru avec la vîtesse de la fin dans la moitié d’un certain temps, est égale à l’espace décrit par un corps accéléré dans ce temps-là tout entier. 2°. Que si un corps en descendant décrit un espace dans un certain temps, dans le double de ce temps-là il en parcourra quatre fois autant, dans le triple neuf fois autant, &c. Ou autrement si les temps sont en progression arithmétique, 1, 2, 3, 4, 5, les espaces seront 1, 4, 9, 16, 25, &c. 3°. Puisque l’espace décrit dans la première partie du temps est 1, dans la seconde 4, dans la troisième 9, &c. si vous considérez séparément l’espace parcouru dans la seconde partie, ce sera 3. Et si de 9, qui est l’espace décrit dans la 3e partie du temps, vous en ôtez 4, qui est l’espace décrit auparavant dans le second moment, il restera 5. Puis donc que les parties du temps sont toutes supposées égales, les espaces décrits par un corps grave dans sa descente, seront comme les nombre impairs dans leur ordre naturel 1, 3, 5, 7, 9, 11, 15, 17, &c. 4°. Puisque les vîtesses acquises dans la chûte sont comme les temps, les espaces parcourus doivent être comme les carrés des vîtesses ; & les temps & les vîtesses pris ensemble seront en raison sous doublée des espaces décrits par un corps qui tombe.

Accélération des étoiles fixes. Terme de l’ancienne Astronomie. Cette accélération est la différence qui se trouve entre la révolution du premier mobile, & la révolution solaire : cette différence est de trois minutes & environ cinquante-six secondes.

ACCÉLÉRER, v. act. Diligenter, presser une affaire, une entreprise. Accelerare. La succession échue à ce jeune homme fera accélérer son mariage. Il faut s’en servir sobrement hors la Philosophie. Les corps graves en tombant accélèrent leur mouvement en certaine proportion qu’on fait voir dans la Statique.

ACCENSE. s. m. Accensus. Terme d’Histoire ancienne, qui signifie Huissier, & quelquefois soldat surnuméraire. Car il y avoit chez les Romains deux sortes de gens qu’on appeloit accensi ; les uns étoient des Officiers, des Magistrats subalternes, qui avertissoient le peuple de s’assembler, introduisoient à l’audience du Prêteur & marchoient devant le Consul, lorsqu’il n’avoit point de faisceaux. Accensi forenses. Leurs fonctions répondoient à celles de nos Huissiers. Les autres étoient à l’armée, des soldats surnuméraires, pour remplir la place des morts ou des blessés. Les premiers se nommoient Accensi, ab acciendo, dit Varron, parce que leur emploi principal étoit de convoquer le peuple. Les autres, parce qu’ils étoient ajoutés au nombre compétant ; quia adcensebantur, ou accensebantur ; c’est-à-dire, ad censum adjiciebantur, ainsi que l’explique Asconius Pedianus.

Accense. s. f. Terme de Coutume. On écrit aussi adcense, & accense. Accensa, datio ad censum, locatio accensiva. C’est ce qu’on appelle louage ailleurs.

On appelle aussi accense un héritage, ou une ferme qu'on tient à certains cens & rente, ou à prix d'argent. Cette métairie est une accense d'une telle Abbaye. Tenir un héritage, une maison en accense.

ACCENSEMENT, ou ADCENSEMENT, ou ACENSEMENT, Terme de coutume. On trouve ce mot dans l’ancienne coutume de Paris, il veut dire la même chose qu’accense, c’est l’action d’accenser.

ACCENSER, ou ACENSER, v. act. C’est ce qu’on appelle louer, Locare, ad censum dare. Il y a encore des Provinces où l’on dit accenser une maison, pour louer une maison. Ce mot vient d’ad censum, en sousentendant dare, donner. Adcense, & adcensement, ont la même origine, aussi bien qu’Accenseur qui suit.



ACCENSEUR & ADCENSEUR, s. m. Terme de coutume. C’est dans la coutume de Berri. Celui qui donne à louage quelque chose. Accensator, qui dat ad censum.

ACCENT, s. m. Inflexion de voix, prononciation qu’on a contracté dans la Province où l’on est né. Sonus vocis. Il faut se garder soigneusement d’un certain accent populaire, qui rend les plus belles choses désagréables. M. Scud. Il est bien difficile de se défaire de l’accent Gascon, ou Normand. On connoît le Pays d’un homme à son accent.

Accent, signifie aussi un certain ton de voix qui est souvent une marque de l’intention de celui qui parle, & qui fait donner une bonne ou mauvaise interprétation à ses paroles. On offense souvent avec des termes flatteurs ; mais l’accent fait tout. Quand on dit les choses d’un certain accent, elles ont un sens bien différent de celui qu’elles ont naturellement.

Accent, signifie en Grammaire, certaine marque qu’on met sur les syllabes, pour les faire prononcer d’un ton plus fort, ou plus foible, & pour marquer les diverses inflexions de la voix. Accentus, voculatio. Les Savans ont observé que l’usage des accens étoit inconnu aux anciens Grecs. Ils ont été inventés par les Grammairiens, pour fixer la prononciation de la Langue grecque. Le Cardinal du Perron dit que les Hébreux appelloient les accens טעם, taham, c’est-à-dire, gustus, parce que c’est comme le goût & le relief de la prononciation.

Il y a trois sortes d’accens. L’aigu, qui relève un peu la syllabe, la bonté. Acutus. Le grave, qui la rabaisse, là. Gravis. Et le circonflexe, qui est composé des deux autres, & qui étend le son, extrême. Circumflexus. On le met sur la plupart des syllabes longues dont on retranche une S, comme trône, pâle, &c. Il y a des Provinces qui ont leurs accens particuliers. Deux des plus marqués sont l’accent Gascon, & l’accent Normand. L’accent Gascon est un accent aigu, qui se fait trop sentir. L’accent Normand est un accent émoussé, grossier & pesant, qui assomme les oreilles. Les Gascons aiment leur accent jusqu’à la folie ; c’est-à-dire, jusqu’à le garder à la Cour même. L’accent Normand est trop grossier pour favoriser la vanité de l’esprit : l’accent Gascon la favorise par je ne sai quelle élevation qui ne déplait pas. Vign. Mar. Il falloit dire plutôt, parce qu’il marque de l’esprit & de la vivacité. M. de Segrais, qui étoit de l’Académie Françoise, & qui avoit passé sa jeunesse à la Cour, a toujours parlé Bas-Normand, & conservé son accent ; ce qui donna lieu à Mademoiselle de Montpensier de dire à un gentilhomme qui alloit faire le voyage de Normandie avec M. de Segrais : vous avez un fort bon guide, il sait parfaitement la langue du pays. Vign. Mar.

Les Hébreux ont l’accent de Grammaire, de Rhétorique, & de Musique, ou plutôt, l’accent de Grammaire & de Rhétorique ; car l’accent de Musique n’est point différent de l’accent de Grammaire qu’on appelle aussi accent Tonique, parce qu’il donne le ton à la syllabe ; & l’accent de Rhétorique se nomme Euphonique, parce qu’il sert à rendre la prononciation plus douce & plus agréable. Il y a quatre accens de Rhétorique, ou Euphoniques, & 25 Toniques, ou de Grammaire, dont les uns se placent sur la syllabe, les autres dessous. Les Grammairiens Juifs, suivis des autres qui ont écrit des Grammaires Hébraïques, les distinguent en accens Rois, & en accens Ministres, ou serviteurs. Les premiers sont ceux qui font une distinction grande ou petite. On les appelle Rois, parce que les autres se rapportent à eux, leur servent, & qu’ils sont dans leur Empire ; c’est-à-dire, dans la phrase que ceux-là gouvernent, & qu’ils terminent. Les seconds sont ceux qui ne font point de distinction, mais qui montrent que la phrase n’est pas finie, qu’il faut rapporter le mot ou le membre sur lequel ils dominent à ce qui suit. Parmi ceux qui font distinction, & qu’on appelle généralement Rois, on distingue encore un Empereur, des Rois, des Ducs, ou Chefs. Tous ces noms sont métaphoriques pour marquer une distinction plus ou moins grande. Celui qui domine sur toute une phrase complète, qui termine un sens entier, s’appelle Empereur : cela revient à ce que nous appelons un point. Celui qui domine sur un grand membre de la phrase, qui termine un sens, qui n’est pas cependant tout-à-fait complet, s’appelle Roi : & c’est à-peu-près comme nos deux points, ou notre point avec une virgule. Enfin, celui qui dans un grand membre en gouverne & en coupe un plus petit, qui fait aussi un sens, mais imparfait, se nomme Duc : c’est, si l’on veut, notre virgule. Au reste, l’accent Roi devient quelquefois Ministre, & le Ministre Roi, selon que les phrases sont plus ou moins longues. De plus, l’art & la combinaison des accens est autre dans la poësie hébraïque, que dans la prose. On dispute beaucoup sur l’usage de tous ces accens Toniques, ou de Grammaire. Un grand nombre de Protestans, sur-tout parmi les Luthériens, soutiennent qu’ils servent à distinguer le sens. Le commun des Catholiques, & les plus habiles Protestans, croient au contraire qu’ils ne servent que pour le chant, ou la musique ;


TomeI. E ij car