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fie, des gens déterminés, & qui ne gardent aucunes mesures pour noircir la réputation d’autrui.

On dit absolument au subst. C’est un abandonné  ; pour dire, un homme perdu & débauché, qui ne donne point d’espérance de conversion. Corruptus, depravatus. On dit aussi une abandonnée ; pour dire une fille prostituée. Je ne veux point brûler pour une fille abandonnée. Mol.

On dit aussi Abandonné des Médecins ; pour dire, que la guérison de quelqu’un est désespérée. Un homme abandonné, signifie un homme sans appui & sans secours. Abandonné à son sens réprouvé. C’est une expression de l’Ecriture, pour désigner un homme qu’on laisse à ses égaremens, & à la perversité de son cœur. On ne doit pas attendre des lumières bien pures, de ceux que Dieu a abandonnés aux ténèbres inséparables des grands crimes. Nicol. On dit aussi, qu’une cause est abandonnée, pour dire, qu’elle est déplorable & insoutenable.

ABANTÉENS. Abantæi. Les peuples d’Argos sont ainsi appellés dans Ovide, Met. XV. v. 164. du nom de leur Roi Abas.

☞ ABANTES. subst. masc. & plur. Abantes., peuples de Thrace, qui passerent en Gréce, & y bâtirent une ville qu’ils nommerent Abée, dont nous avons parlé. Xerxès l’ayant ruinée, ils se retirerent dans l’île de Négrepont, qu’ils nommerent Abantide. Ils ne laissoient croître leurs cheveux que par derrière, de peur que leurs ennemis ne pussent les prendre par devant, & les terrasser. Ils tenoient, dit-on, cette coutume des Curétes, qui s’étoient établis avant eux dans la même île. Boch. Chanaan, L. I. C. XIII. prétend qu’Abantes & Eubéen signifie la même chose ; l’un en Grec & l’autre en Phénicien. Eubéens en Grec, signifie celui qui nourrit & engraisse des bœufs, de נ βόζ & Abas, אכם, en Hébreu, signifie engraisser. Il ne faut point confondre les Abantes avec les Abéates. Voyez ce mot.

ABANTIDE. subst. fem. Abantis. C’est le Négrepont. Voyez Abantes. Il semble qu’en François il faut dire Abantide, & non Abantis, comme fait Maty. Car les noms Latins & Grecs en is, dont le génitif est en idis, nous les avons terminés en ide, les formant du génitif. Ainsi de Colchis, nous avons fait Colchide, de Propontis, Propontide, de Mareotis, Maréotide, &c. Aussi, si nous n’avions que l’autorité de Maty, nous douterions moins ; mais M. Corneille met Abantide, ou Abantis. Après tout, cela ne fait point encore l’usage, & lui-même, dans le même endroit, a dit Thesprotide de Thesprotis.

On appelle aussi Abantide un pays de l’Épire, ou les Abantes furent jettés, aussi-bien que les Locriens, après la prise de Troye, & où ils s’établirent. Voyez Pausanias.

Abaque. subst. masc. Abacus. Terme d’Architecture. C’est la partie supérieure, ou le couronnement du chapiteau de la colonne. Il est quarré au Toscan, au Dorique, & à l’Ionique antique, & échancré sur ses faces aux chapiteaux Corinthien & Composite. Dans ces deux ordres, dit Harris, ses angles s’appellent cornes, le milieu s’appelle balai, & la courbure s’appelle arc, & elle a communément une rose en sculpture au milieu. Les ouvriers, dit Mauclerc, appellent aussi Abaque un ornement Gothique, qui a un filet ou chapelet, lequel est la moitié de la largeur de l’ornement, & que l’on nomme le filet ou chapelet de l’abaque. Harris. Dans l’ordre Corinthien l’abaque est la septième partie de tout le chapiteau. Id. Andrea Palladio appelle Abaque la plinthe qui est autour de l’ove, ou quart de rond appellé Echine. Il sert comme de couvercle à la corbeille ou panier de fleurs qu’elle représente. On l’appelle autrement Tailloir, parce qu’étant quarré, il ressemble aux assiettes de bois, qu’on nomme Tailloirs. Il se met en plusieurs sortes d’endroits. Ce mot vient du Grec ἄϐαξ, qui signifie Buffet, crédence ou table. Étienne Guichard remonte plus haut, & tire Abacus & ἄϐαξ de l’Hébreu אכך, extolli, elevari, être élevé : de sorte que abaque signifie proprement une chose élevée pour servir de siége, & répositoire de diverses choses : ou bien de אבף terre, poussière bien menue, parce que l’abaque étoit une table où l’on étendoit de la poussière bien menue, sur laquelle les Mathématiciens traçoient leurs figures.

ABARE. s. m. Abaricus. Nom de peuple. Voyez Avare. M. de Cordemoy & le P. Daniel écrivent Abares. C’étoient les restes de la nation des Huns. Sigebert ayant appris les courses du Roi des Abares, alla au-devant de lui dans la Thuringe.


La seule figure de ces Huns avoit de quoi épouvanter des gens moins intrépides que les François. Ils étoient pour la plûpart d’une taille qui approchoit de la gigantesque, d’un regard farouche, & d’une laideur à faire peur. Ils avoient de grands cheveux rejettés sur les épaules, séparés avec des cordons & par tresses, qui rendoient leurs têtes assez semblables à celles de ces Furies qu’on nous dépeint toutes hérissées de serpens. P. Dan.

ABAREMO-TEMO. s. m. Arbre du Brésil. Il est d’une hauteur médiocre ; il croît sur les montagnes ; ses feuilles sont d’un vert triste & petites ; il jette des gousses d’un rouge noirâtre, courbées en différentes manières. Son écorce est couleur de cendre ; le bois au-dedans est d’un rouge foncé. On attribue à ses feuilles des qualités astringentes. Son écorce, qui est amère, quand on la réduit en poudre, ou qu’on la fait bouillir, sert à faire des fomentations, qui guérissent les ulcères invétérés, & même les cancers. Pisor.

ABARIM. s. m. Mons ou Montes Abarim. Vulg. Montagne de l’Arabie, à l’orient du Jourdain, vis-à-vis de Jéricho, dans le pays des Moabites. C’est l’avant dernière station des Israëlites dans le désert, & le lieu d’où Moyse vit la Terre-promise. {Nombres XXVII. & où il mourut. Deut. XXXII. Une de ces montagnes s’appelle Nébo, & l’autre Phasga, ou Phisga. Montez sur cette montagne d’Abarim, & considérez de-là la terre que je dois donner aux enfans d’Israël. Sacy. Nomb. XXVII. 12.

Ce nom est purement Hébreu, & vient du Verbe עבר, abhar, passer ; d’où se fait עבר, ebher, passage, & au plurier עברים, Abharim, les passages. A la manière dont les Septante ont traduit au Livre des Nomb. Ch. XXVII. v. 12. Ἁνάβηθι εἰς τὸ ὄρος τὸ ἐν τῷ πέραν του ὄρους ναβάν ; ou comme d’autres exemplaires portent : ἐν τῷ πέραν τοῦ Ἰορδάνοῦ ; il semble que les Interprètes aient crû que ce nom avoit été donné à ces montagnes, ou parce qu’elles étoient au-delà de la montagne Nébo, ou parce qu’elles étoient au-delà du Jourdain. Ni l’un ni l’autre ne paroît vrai. Le premier sur-tout ne paroît pas soutenable, puisque Nébo, qu’ils appellent Ναβαν, ou Ναβάου, étoit une de ces montagnes. Maty prétend qu’elles ont eu ce nom de ce que les Israëlites allant prendre possession de la Terre-promise, passerent par ces montagnes ; mais il semble certain qu’elles ont eu ce nom avant le passage des Israëlites. La véritable raison de cette dénomination, si je puis parler ainsi, est que ces montagnes étoient vis-à-vis d’un gué du Jourdain, & que dans les cols de ces montagnes, étoit le grand chemin qui y aboutissoit, & par lequel on passoit de l’Orient dans la terre de Chanaan. Il est encore moins raisonnable de chercher dans le Syriac une étymologie à ce nom, & de dire que dans cette langue il signifie froment : car outre que c’est en Hébreu & non en Syriac, que ces montagnes sont nommées Abarim, c’est que froment en Syriac n’est point abhar ni abher, mais ועברא, abhourro, qui assurément n’auroit point au plurier Abarim.

ABARIME, ou ABARIMON. s. Abarimon. Grande vallée que forme le mont Imaüs dans la Scythie. Pline. L. II. C. 2.

ABARO. Abarum. Bourg, ou petite ville de Syrie, située dans l’anti-Liban, apparemment dans un col ou passage de cette montagne ; car c’est la signification de ce nom en Syriac & en Arabe. Voyez ce que nous avons dit sur Abarim.

☞ ABASOURDIR. v. a. Etourdir, consterner, jetter dans l’abattement. Et comme il est le maître, & qu’il a du crédit, D’une seule menace il nous abasourdit. Com. des Fables d’Esope.

ABASSE, ou ABASCE. s. m. & f. Abassus, Abascius. Habitant de l’Abassie. Les esclaves Abasses sont recherchés en Turquie, à cause de leur industrie & de leur beauté. Les Abasses enferment leurs morts dans un tronc d’arbre creusé, dont ils leur font une bière, qu’ils attachent ensuite aux plus hautes branches d’un grand arbre.

ABASSI, ou ABASSIS. subst. m. C’est une monnoie d’argent qui est ronde, & qui a cours en Perse & en Orient, qui vaut un peu plus de dix-huit sous six deniers. Il faudroit écrire Abbassi, parce que ce mot vient d’Abbas, nom de deux Rois de Perse, au nom desquels cette monnoie a été frappée. En leur montrant un Abassi, qui est une monnoie d’argent de la valeur de deux réales de Castille, ils firent espérer une récompense à ceux qui leur voudroient servir de guide. Wicqefort.


ABASSIE.