Page:Trevoux - Dictionnaire , 1704, T01, A-Cenobitique.djvu/50

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ABS. ABS. ABU.

Wetstein, Professeur à Bâle, en Langue Grecque, a opposé aux paradoxes de Hennin une sçavante Dissertation, où il fait voir que les accens qui sont dans les Livres Grecs, soit imprimés, soit manuscrits, ont une bien plus grande antiquité. Il avoue que ces accens n’ont pas toujours été marqués de la même manière que les Anciens, & il en apporte en même temps la raison. Comme la prononciation de la Langue Grecque n’a pas été la même chez tous les peuples, il n’est pas étonnant que les Doriens les aient marqués d’une manière, & les Æoliens d’une autre. De même, ajoûte-t-il, un même peuple a prononcé différemment sa Langue en différens temps. Cette Dissertation, qui est pleine d’érudition, a été imprimée à Bâle en 1686, sous le titre de Dissertatio epistolica de accentuum Græcorum antiquitate & usu, à la fin de ses Discours apologétiques pour la véritable prononciation de la Langue Grecque.

Il n’est pas possible de fixer exactement le temps auquel les Grecs ont marqué les accens dans leurs Livres. Mais on peut assurer que Hennin & Isaac Vossius ont un peu outré cette matière. Wetstein a aussi trop étendu quelques-unes de ses preuves. De plus, on doit demeurer d’accord que les accens ne sont point marqués dans les Livres Grecs qui ont mille ans d’antiquité. Mais il ne s’ensuit pas de là que ces accens ne fussent point encore dans ce temps-là en usage chez les Grecs. Cela prouve seulement, que la plûpart des Copistes les ont négligés ; & c’est ce qui fait qu’il est très-rare de trouver d’anciens Manuscrits où ils soient marqués. C’est la remarque que M. Simon, qui a lu un grand nombre de Manuscrits Grecs, a faite dans son Histoire critique du Nouveau Testament, où il dit : l’Exemplaire Grec & Latin de Cambridge, qui contient les quatre Evangélistes & les Actes des Apôtres, & qui est au moins ancien de mille ans, n’a aucuns accens. L’Exemplaire Grec & Latin des Epîtres de S. Paul qui est dans la Bibliothèque du Roi, & qui n’est pas moins ancien que celui de Cambridge, a à la vérité des accens ; mais il paroît qu’ils y ont été ajoutés après coup, parce qu’ils ne sont point de la même main que l’écriture de tout le Livre. Georges Syncelle, ajoute M. Simon, fait mention d’un Exemplaire Grec de la Bible, qui étoit écrit avec une grande exactitude, où l’on avoit mis les points & les accens. Syncelle dit que cet Exemplaire lui étoit venu de la Bibliothèque de Césarée en Cappadoce, & qu’on voyoit par l’inscription qui étoit au-devant du Livre, qu’il avoit été copié sur un Exemplaire qui avoit été corrigé par le grand S. Basile.

Hennin ne paroit pas exact, quand il assûre que les accens sont une invention des Arabes, qui fut perfectionnée par Alchalil vers le temps de la mort de Mahomet ; que les Massorettes de Tibériade, au milieu du sixième siècle adopterent cette invention, & que celui qui perfectionna les accens, fut le Rabbin Juda ben David Chiug, natif de Fez, dans l’onzième siècle. Il se peut faire à la vérité, que les Juifs aient emprunté leurs points voyelles des Arabes ; mais comment auroient-ils pris de ces mêmes Arabes leurs accens, puisque la Langue arabe n’a aucuns accens, ni dans la prose, ni dans les vers ? La poësie est très-ancienne chez les Arabes, & long-temps avant Alchalil Eben Ahmed, qui l’a seulement réduite en art, marquant les mesures des vers que nous appelons en Latin pedes, les pieds. C’est ce que Samuël Clarck a fort bien expliqué dans son Livre intitulé, De Prosodiâ arabicâ.

À l’égard des Juifs, on peut croire que les Massorettes de Tibériade ont ajouté les accens au texte Hébreu de toute la Bible. Ceux qui disent que le Rabb. Juda de Fez perfectionna les accens, n’ont avancé cela que parce qu’ils ont crû que ce Rabbin a été le premier Grammairien des Juifs. Mais ils se trompent ; car Rabb. Saadias Gaon, qui vivoit long-temps avant Juda Chiug, a composé une Grammaire hébraïque. On trouve dans l’Histoire Critique de l’Ancien Testament, Chap. 30, un Catalogue des Grammairiens Juifs, à la tête desquels est ce Rabb. Saadias. M. mon dit en ce lieu-là : Après que les Juifs de Tibériade eurent ajouté les points voyelles & les accens au texte de la Bible, les Docteurs des autres Ecoles commencerent à les imiter. Ils mirent ces points & ces accens dans leurs exemplaires, que les particuliers décrivirent ensuite.


Les accens des Hébreux ont quelque chose de commun avec les accens des Grecs & des Latins, & ils ont en même temps quelque chose de particulier, & qui ne se trouve que dans la Langue hébraïque. Ce qu’ils ont de commun, c’est qu’ils marquent les tons, quand il faut élever, ou abaisser la voix sur certaines syllabes. Quand un Juif habile lit le texte Hébreu de la Bible, il chante plutôt qu’il ne lit, parce qu’il le prononce selon les tons qui sont marqués par les accens. Pour ce qui est particulier à cette langue à l’égard des accens, c’est qu’ils y font la même chose que les points & les virgules dans le Latin, dans le Grec, & dans le François, ils distinguent les sections, les périodes, & les membres des périodes.

Les Poëtes & les amoureux se servent quelquefois du mot d’accens au plurier, pour signifier la voix, ou les cris. Les accens plaintifs. Les derniers accens. Il expliqua sa passion par ces tristes accens. Pousser des accents funèbres.

ACCENTUER. v. a. Marquer les syllabes avec des accens, pour avertir comment il les faut prononcer. Syllabæ accentum apponere. Cet é est accentué, il le faut prononcer plus fortement.

ACCEZPTABLE. adj. masc. & fem. Ce qu’on ne peut raisonnablement refuser. Accipiendus, quod potest accipi. Ces offres, ces propositions sont accèptables, & ne doivent point être rejettées. Cela est du style simple.

ACCEPTANT, ante. adj. Terme de Pratique. Celui qui accèpte, qui agrée ce qu’on fait en sa faveur. Dans tous les Contrats on dit, qu’un acquéreur, ou donataire, est présent & accèptant. Dans les cessions à un absent, le Notaire prend qualité d’accèptant pour le cessionnaire.

ACCEPTATION. s. f. Consentement de celui qui accèpte, action par laquelle on reçoit volontairement, on agrée ce qui est proposé, offert. Acceptio. L’accèptation d’une donnation est nécessaire pour sa validité : c’est une formalité essentielle. L’accèptation est le concours de la volonté du donataire, qui donne la perfection à l’acte ; sans quoi le donateur peut révoquer son don. Si le porteur d’une lettre de change n’en fait point faire l’accèptation dans un certain temps, il n’a plus de garantie sur le tireur. Savary.

En matière bénéficiale, l’accèptation doit être faite au temps même de la résignation, & non ex intervallo. L’accèptation est réputée faite par un Gradué, nommé, quand il a demandé à l’ordinaire qu’il lui confère le Bénéfice. Bouchel.

ACCEPTER. v. act. Recevoir, agréer le don qu’on nous a fait, ou la charge qu’on nous impose. Accipere. Il a accèpté une charge difficile à remplir. La loi est censée accepter pour les mineurs, & elle supplée à leur intention dans les choses favorables. Courtin. Accepter un leg, une donation, une cession. Accepter un combat sur un deffi. Accèpter la paix, les conditions d’un traitté. Il faut remarquer que ce mot est moins étendu que recevoir ou agréer, & qu’il suppose quelque traitté ou négociation. On le dit pourtant quelquefois lorsqu’il ne s’agit point d’affaires : Les Juges ne doivent accepter aucuns présens des Parties ; pour dire simplement, Recevoir.

Elle venoit, Seigneur, fuyant votre courroux,
A la face des Dieux l’accèpter pour époux.

Racin.

On dit aussi, Accepter une lettre de change, pour en empêcher le protest, lorsqu’on la souscrit, & qu’on promet de la payer.

On dit aussi au Palais, Accepter les offres de sa partie. Les offres qui ne sont point acceptées sont sujettes à révocation.

ACCEPTILATION. s. f. Terme de Jurisprudence Romaine. Quittance qu’on donne sans recevoir de l’argent ; déclaration qu’on fait en faveur de son débiteur, qu’on ne lui veut plus rien demander, qu’on a été satisfait d’une dette, ou qu’on la lui quitte ; qu’on la lui remet. On trouve dans le droit une certaine forme prescrite pour l’acceptilation. Ulpien a cependant décidé que l’acceptilation n’est point aux paroles ; & qu’étant de droit naturel que chacun remette ce qui lui est dû, en la manière qu’il lui plaît, elle ne dépend point des formalitez.

ACCEPTION. s. f. Considération qu’on a pour quelqu’un plutôt que pour un autre.


Respectus, discrimen, delectus. Les bons Juges ne font aucune acception des personnes. On s’est servi autrefois aussi en ce sens du mot d’acceptation ; mais acceptation est plus propre pour les affaires, & acception pour les personnes.

Acception. Terme de Grammaire. Sens dans lequel on prend un mot. Significatio, notio, intellectus. Ce mot a plusieurs acceptions. Dans sa première & plus naturelle acception, il signifie, &c.

ACCE’S, s. m. Abord, entrée ; facilité d’approcher de quelque personne, ou de quelque chose. Aditus. Heureux celui qui a accès auprès du Roi. Cèt homme cherche quelque accès dans cette maison, quelque connoissance qui lui en facilite l’entrée. C’est un homme dans l’esprit duquel il est impossible de trouver aucun accès. S. Evr. L’accès de cette côte est difficile à cause des rochers.

Accès, se dit aussi en Médecine des retours périodiques de certaines maladies, qui laissent quelques bons intervalles. Accèssio, accèssus. Il a eu un accès de fièvre, de goutte. Il lui prend quelquefois un accès de folie.

ACCESSIBLE. adj. m. & f. Ce qui peut être approché. Ad quem facilis est aditus. On le dit des lieux & des personnes. L’humeur farouche de ce Juge fait qu’il n’est accessible qu’à peu de gens. Il étoit accèssible à toute heure & à tout le monde. Le Gend. Cette place n’est accessible que par un seul endroit.

ACCESSION. s. f. Terme de pratique. L’action d’aller dans un lieu. Accessio. Le Juge a ordonné une accession de lieu, pour dresser procès verbal de l’état des choses. Il signifie aussi l’union d’une chose à une autre que l’on possédoit déjà ; en ce cas c’est la même chose qu’accroissement :s’approprier un fonds par droit d’accession. Le droit explique diverses sortes d’accessions, en vertu desquelles une chose jointe à une autre accroît au profit du propriétaire de la chose à laquelle l’autre a été unie. La pourpre par voie d’accession appartient au maître du drap avec lequel elle a été confondue par la teinture. Inst. P. 2, T. i.

ACCESSIT, Terme de College. Récompense qu’on donne aux écoliers qui ont composé presqu’aussi-bien que celui qui a emporté le prix. Un tel a eu le premier prix des vers, & un tel le premier accessit ; c’est-à-dire, qu’il est celui qui a approché le plus près.

ACCESSOIRE, s. m. Dépendance du principal, suite de quelque chose qui est plus considérable. Accessio. Les depens, qui ne sont qu’un accessoire, montent souvent plus haut que le principal. L’accèssoire doit céder au principal. Persée fut le principal acteur de la guerre, & Gentius n’en étoit que comme l’accèssoire. Ablanc. La caution dans le contract est un accessoire qui fortifie le contract.

ACCESSOIRE, se prend figurément pour un état fâcheux. Status acerbus. Il étoit dans un étrange accessoire. Acad. Fr. On ne s’en sert plus en ce sens.

Accessoire, pris comme adjectif, se dit de ce qui n’est point de l’essence d’une chose, mais que l’on y joint comme un accompagnement. Adscitus, adventitius.

Accessoire, en matière de Pharmacie, veut dire un changement qui arrive au médicament par des causes extérieures, & qui augmente, ou qui diminue sa vertu.

ACCIDENT, s. m. Terme de Philosophie, propriété accidentelle, ce qui survient à la substance, & qui ne lui est pas essentiel ; qui peut y être, ou n’y être pas, sans qu’elle périsse. Accidens. Un accident, ou un mode, c’est ce que nous concevons nécessairement dépendant de quelque substance. Roh. La blancheur est un accident dans une muraille, parce que cette muraille peut subsister sans la blancheur : au lieu que la blancheur ne peut subsister sans qu’elle soit soutenüe par quelque substance. Les Cartésiens disent que l’extension constitue l’essence de la matière, & que les accidens ne sont que des modifications, qui n’en sont point distinctes réellement. Ces sentimens sont rejettés par les Théologiens, comme contraires à ce que la Foi nous enseigne touchant l’Eucharistie.

Accident, Evènement fortuit, hasard, coup de fortune. Casus. Malheur imprévu. Casus adversus. Il y a des gens à qui la faveur arrive comme un accident, ils en sont surpris les premiers. La Bruy.

Accident, signifie aussi les circonstances, & les incidens d’une action : Quand Sapho veut exprimer les fureurs de l’Amour, elle ramasse


Tome I. B ij ne,