Page:Tristan L’Hermite - Les Amours de Tristan, 1638.djvu/186

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Vous leur verriez en l’air former vn bataillon
Si toſt qu’entre leurs camps la guerre ſe commence ;
Leur petit Roy volant, qui n’a point d’aiguillon,
      Vous enſeigneroit la clemence :
À vous dont le couroux a tant de vehemence,
      Et dont les yeux, ou le penſer
Ont touſiours quelques traits qui me viennent bleſſer.

De là, pour menager vn temps ſi precieux,
Viſitans d’vn eſtang la pareſſe profonde,
Lors que l’on ſent leuer vn Zephir gracieux
      Et baiſſer le flambeau du monde :
Vous pourriez comme luy vous aprocher de l’onde,
      Et par vn miracle nouueau
Faire voir à la fois deux Soleils deſſus l’eau.

S’il vous plaiſoit d’aller par ce frais Element,
I’aimerois d’auirons vne nacelle vuide :
Bien que l’Amour me tienne en ſon aueuglement,
      I’oſerois vous ſeruir de guide
À faire tout le tour de ce Christal liquide,
      Où les Diuinitez des eaux
Dorment deſſus des lits de ioncs & de roſeaux.