Page:Trollope - Les Bertram, volume 2.djvu/112

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ai perdu l’habitude ; puis, mes bottines ne sont pas ce qu’il faut pour cela.

— J’espère qu’elles ne vous font pas mal ?

— Oh ! non, elles ne me font pas précisément mal ; elles iront très-bien pour aujourd’hui. — Puis il y eut un silence, et ils se mirent à marcher sur la pelouse qui est devant les fenêtres du presbytère, et qui s’étend jusque sous le bois. Je voudrais bien savoir si, dans les soirs d’été, on y joue encore au cricket ?

Ils se trouvèrent bientôt aussi seuls — ou presque aussi seuls que pouvaient le souhaiter des amoureux ; assez seuls, du moins, au gré de Caroline. Quelques regards curieux les épiaient encore, peut-être pour voir quel air avait le célèbre avocat en se promenant avec la jeune fille de son choix, et comment aussi se comportait la petite-fille du vieil avare millionnaire lorsqu’elle se promenait avec celui qu’elle aimait. Quelques voix, peut-être, murmuraient tout bas qu’elle avait changé d’amoureux, car tout se sait et se redit dans ces agrestes solitudes. Mais ni ceux qui épiaient, ni ceux qui chuchotaient ne troublaient le bonheur de l’heureux couple.

— J’espère que vous êtes heureuse, Caroline, dit sir Henry en pressant légèrement la main qui reposait à peine sur son bras.

— Heureuse… oui, je suis heureuse. Je ne crois pas, vous le savez, à la félicité parfaite. Je n’y ai jamais cru.

— Mais j’espère que vous êtes raisonnablement heureuse… que vous n’êtes pas mécontente… que vous