Page:Trollope - Les Bertram, volume 2.djvu/223

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précieux ornements qui garnissaient la cheminée. Pourquoi ne s’en allait-il pas ? Pourquoi restait-il là pensif et muet ? Pourquoi, pourquoi était-il si cruel envers elle ?

— J’espère que vous êtes heureuse, dit-il enfin. Une résolution presque farouche se peignit sur le visage de Caroline quand elle lui répondit, en faisant un violent effort pour dompter son émotion : — Merci… oui, dit-elle ; et puis, elle ajouta : Je n’ai jamais beaucoup cru au bonheur.

Cependant il ne s’en allait pas. — Nous nous sommes revus, enfin, dit-il après un nouveau silence.

— Oui, nous nous sommes revus, répéta-t-elle ; et elle essaya de sourire en lui répondant.

— Et il n’est pas nécessaire que nous soyons comme des étrangers ? Il y eut un nouveau silence, car elle ne trouvait pas de réponse. — Faut-il que nous soyons comme des étrangers l’un pour l’autre ? reprit-il.

— Je ne le pense pas ; du moins si sir Henry désire qu’il en soit autrement.

Alors il lui tendit la main, et, lui souhaitant de nouveau le bonsoir, il s’en alla.

Pendant plus d’une heure, lady Harcourt resta devant la cheminée à regarder le feu qui s’éteignait lentement. Quos Deus vult perdere, prius dementat. Elle ne se dit pas ces mots, sans doute, mais une pensée toute semblable dut lui traverser l’esprit pendant qu’elle restait là, immobile, à réfléchir au misérable aveuglement de son mari.