Page:Trollope - Les Bertram, volume 2.djvu/277

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pouvoir jamais aimer, — avec un homme que je n’ai jamais essayé, que je n’ai même jamais voulu essayer d’aimer, ce jour-là, dis-je, j’ai mis, je le sais, une barrière infranchissable entre le bonheur et moi. Mais ne croyez pas que j’espère la délivrance. Et pendant qu’elle parlait ainsi, le visage de lady Harcourt prit une expression d’implacable résolution, qui promettait qu’elle serait de force à supporter son sort, quel qu’il pût être.

— Caroline, à brebis tondue Dieu mesurera le vent, maintenant comme toujours, si vous le lui demandez.

— Je le désire ; je le désire de tout mon cœur.

— Dites que vous le croyez.

— Oui, je le crois. Je crois que tout ce qu’il fera sera bien fait. Oh ! Adela, si vous saviez ce qu’a été ce dernier mois, depuis qu’il est venu à la maison !

— Ah ! pourquoi y est-il venu ?

— Pourquoi, en effet ? Jamais homme a-t-il agi plus follement ?

Caroline faisait allusion à sir Henry Harcourt, et non à George Bertram.

— Mais j’en suis bien aise, continua-t-elle, bien aise, je vous assure. Maintenant il sait la vérité tout entière. Je lui ai tout dit.

— À sir Henry, voulez-vous dire ?

— Oui, je lui ai tout dit le jour avant de m’en aller, mais je ne lui ai rien appris, Adela ; il le savait. Il n’a jamais pu s’imaginer que je l’aimais. Il savait, il devait savoir que je le haïssais.

— Oh ! Caroline, Caroline, ne parlez pas ainsi !