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LES AVENTURES DE TOM SAWYER.

retrouvé l’amulette protectrice, ses compagnons ne tenaient plus qu’à se reposer. Ils ne paraissaient même pas avoir envie de causer, et s’assirent à l’écart. Comme ils regardaient tous les deux du côté de Saint-Pétersbourg, Tom s’inquiéta et s’empressa de les rejoindre. Joe releva à peine la tête à son approche. Huck aussi commençait évidemment à broyer du noir. Tom se rassura en songeant qu’il possédait un secret qui ne pouvait manquer d’enrayer une mutinerie ; mais ce secret, il craignait que la mauvaise humeur de ses compagnons ne l’obligeât à le révéler trop tôt.

— Allons, mes braves, s’écria-t-il, remuons-nous. Je parie qu’il y a eu des pirates avant nous dans cette île. Ils ont dû enterrer leur trésor quelque part. Que diriez-vous si nous tombions sur un coffre plein d’or et de bijoux ?

Ces paroles furent accueillies avec peu d’enthousiasme. Tom fit deux ou trois autres vaines tentatives pour relever le prestige de son repaire. Le visage de Joe s’assombrissait de plus en plus.

— J’en ai assez, dit-il enfin. On s’ennuie trop dans ton repaire.

— Par exemple ! répliqua Tom. On prend plus de poisson ici en dix minutes que là-bas en une heure. Et puis, où trouveras-tu un meilleur endroit pour te baigner ?

— L’endroit est bon ; mais je n’ai plus de plaisir à me baigner, maintenant que personne ne me le défend.

— Pauvre bébé, il veut revoir sa maman !

— Eh bien, oui, je veux la revoir ; et je ne suis pas plus un bébé que toi ! répondit Joe qui, malgré son assertion, pleurnichait un peu.

— On se passera de lui, pas vrai, Huck ? Nous n’avons pas envie de nous en aller, nous, n’est-ce pas ?

— N…o…n, répliqua Huck, d’un ton peu convaincu.

— Qu’il parte, continua Tom. Si on le montre au doigt, si on l’ap-