Page:Twain - Les aventures de Tom Sawyer, trad Hughes, illust Sirouy, 1884.djvu/177

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
166
LES AVENTURES DE TOM SAWYER.

avait pu s’en emparer en donnant un seul coup de bêche. Cette fois cependant, ils durent reconnaître qu’ils étaient loin d’être arrivés à six pouces de la cachette, et ils s’éloignèrent, leurs outils sur l’épaule, convaincus qu’ils avaient rempli tous les devoirs qui incombent à des explorateurs scrupuleux.

Lorsqu’ils s’arrêtèrent en face de la maison hantée, ils ne se sentirent pas rassurés. Son aspect désolé, le silence et la solitude qui régnaient autour de cette habitation déserte leur parurent lugubres. Ils hésitèrent d’abord à s’aventurer à l’intérieur, mais ils s’enhardirent peu à peu jusqu’à s’approcher du seuil et à jeter un regard craintif par l’ouverture où se trouvait autrefois la porte. Ce regard leur montra une couche de mauvaises herbes qui remplaçait le plancher, une vieille cheminée démantelée et un escalier en ruine. Çà et là se balançaient des filandres de toiles d’araignée que les tisseuses avaient abandonnées. Enfin ils entrèrent d’un pas circonspect, se gardant bien de parler, l’oreille tendue, prêts à battre en retraite à la moindre alerte.

N’apercevant rien de suspect, ils s’aguerrirent bientôt et examinèrent le local, admirant leur propre courage et s’en étonnant un peu aussi. Ils songèrent ensuite à gravir l’escalier. C’était en quelque sorte se couper la retraite ; mais ils se mirent à se défier l’un et l’autre, tactique qui ne pouvait avoir qu’un seul résultat. Ils déposèrent leurs outils contre un mur et montèrent. Le premier étage était aussi dégradé que le rez-de-chaussée. Dans un coin s’ouvrait un cabinet obscur qui promettait de cacher un mystère ; mais la promesse était un leurre, le cabinet ne contenait rien. Rendus courageux par l’impunité, ils se disposaient à redescendre afin de commencer leurs fouilles, lorsque Tom retint son compagnon par le bras.

— Qu’est-ce qu’il y a ? demanda Huck. Tu m’as fait peur.

— Sh… Écoute. Entends-tu maintenant ?

— Oui, on cause devant la porte. Sauvons-nous !