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LE NUMÉRO DEUX.


XXVI

LE NUMÉRO DEUX.


Les événements de la journée valurent encore de mauvais rêves à Tom. Quatre fois il mit la main sur un riche trésor, et quatre fois le trésor s’évapora entre ses doigts au moment où le sommeil l’abandonnait. Alors, la dure réalité lui apparaissait. Le lendemain matin, bien avant l’heure du lever, tandis qu’il passait en revue les incidents de la veille, il remarqua qu’ils semblaient étrangement effacés et lointains, comme s’ils fussent arrivés dans un autre monde ou à une époque très reculée. Alors, il s’imagina que la grande aventure elle-même pourrait bien n’être qu’un rêve. Un argument plausible militait en faveur de cette idée : la quantité d’or renfermée dans la caisse était trop énorme pour être réelle. La plus forte somme d’argent monnayé qu’il eût jamais vue ne dépassait pas cinquante dollars. Comme beaucoup d’enfants de son âge et de sa position sociale, il se figurait que les allusions qu’il entendait faire à des centaines, à des milliers de dollars, n’étaient que des façons de parler et qu’il n’existait pas un seul individu qui possédât plusieurs centaines de dollars en espèces sonnantes. Si l’on avait pu analyser ses notions au sujet des trésors cachés, on aurait reconnu que son ambition était des plus modestes.

À force d’y songer, il finit par se présenter les incidents de son aventure sous un aspect moins nuageux. Après tout, ce n’était peut-être pas un rêve. Afin de dissiper cette pénible incertitude, il résolut de déjeuner à la hâte et d’aller à la recherche de Huck.

Il aperçut ce dernier assis au bord d’un bateau plat, se balançant