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LES AVENTURES DE TOM SAWYER.

— Avec cela qu’ils sont rares !

— C’est le premier que je rencontre cette année.

— Je te donne cette dent en échange, dit Tom, qui tira de sa poche un bout de papier qu’il déroula avec soin.

— Elle n’est pas fausse ? demanda Huckleberry, qui la contempla d’un air de convoitise.

Tom souleva sa lèvre supérieure.

— Tope là, dit Huckleberry.

Tom renferma l’insecte dans la boîte qui servait naguère de prison au scarabée, et les deux amis se séparèrent, chacun d’eux se croyant plus riche qu’il ne l’était avant ce marché.

Lorsque Tom atteignit la petite maison isolée où se tenait l’école, il entra du pas allègre d’un élève, sans peur et sans reproche, qui se pique de n’avoir pas perdu une seconde en route. Il accrocha son chapeau à une patère et s’installa à sa place habituelle. Le bourdonnement soporifique qui régnait dans la salle cessa tout à coup, et le maître, assoupi dans sa chaire, se réveilla.

— Thomas Sawyer ?

Tom savait par expérience que lorsqu’on prononçait son nom sans employer le diminutif, cela ne présageait rien de bon.

— Monsieur ?

— Avancez à l’ordre. Pourquoi arrivez-vous encore en retard ?

Tom allait invoquer une excuse banale, quand il aperçut deux nattes de cheveux qu’il voyait pour la première fois à l’école, mais qu’il reconnut parfaitement, et à côté de celle dont ces nattes ornaient le dos se trouvait la seule place vide qui existât sur le banc des filles. Il répondit aussitôt :

— Je me suis arrêté pendant quelques minutes pour causer avec Huckleberry Finn.

Le professeur demeura bouche béante. Le bourdonnement fut inter-