Page:Urfé - L’Astrée, Première partie, 1631.djvu/500

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Tant y a que Polemas se voyant enfin payé de la mesme monnoye dont il paya vostre niece, n’a peu pour cela perdre, ny l’esperance, ny l’amour, au contraire a recherché toute sorte d’artifice pour r’entrer en grace, mais jusques à ceste heure fort inutilement. Il est vray que s’il n’a peu rien obtenir de plus avantageux, il a pour le moins fait en sorte, que celuy qui a esté cause de son mal, n’a pas esté le possesseur de son bien ; car, soit par les artifices ou par la volonté des dieux, qu’un certain devot druide luy a declarée depuis quelque temps en ça, Lindamor n’est plus aimé. Et semble qu’Amour ait pris dessein de ne laisser jamais en repos l’estomac de Galathée, la memoire de l’un n’estant si tost effacée en son ame qu’une autre n’y prenne place.

Et nous voicy à ceste heure reduittes à l’amour d’un berger, qui comme berger peut en sa qualité meriter beaucoup, mais non point en celle de servituer de Galathée. Et toutesfois elle en est si passionée, que si son mal eust continué, je ne sçay ce qu’elle fust devenue, pouvant dire n’avoir jamais veu une telle curiosité ny un si grand soing que celuy qu’elle a eu durant son mal.

Mais ce n’est pas tout ; il faut qu’en ce que je vay vous dire, ô sage Adamas, vostre prudence face paroistre un de ses effects ordinaires. Vostre niepce est tant esprise de Celadon que je ne sçay si Galathée l’est d’avantage. Là dessus la jalousie s’est meslée entre elle et quoique j’aye tasché d’excuser et de rabatre ces coups le plus qu’il m’a esté possible, si est-ce que j’en desespere à l’advenir. C’est pourqoui je loue Dieu de vostre venue, car sans mentir je ne sçavois plus comme m’y conduire sans vous. Vous m’excuserez bien si je vous parle ainsi franchement de ce qui vous touche, l’amitié que vous porte à tous deux m’y contraint.

Ainsi paracheva Silvie son discours avec tant de demonstration de trouver ceste