Page:Urfé - L’Astrée, Première partie, 1631.djvu/506

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elle n’y est pas, et le petit Meril quand elles n’y peuvent demeurer, que je ne sçaurois tourner le pied que je ne les aye à mes costez. Et lors que j’en aye voulu parler à Galathée, elle s’est mise aux reproches contre moy, avec tant de colere, qu’il faut advouer que je n’ay osé luy en parler depuis, mais ce sejour m’a de sorte esté ennuyeux que je l’accuse principalement de ma maladie. Que si vous avez jamais eu compassion d’une personne affligée, mon pere, je vous adjure, par les grands dieux que vous servez si dignement, par vostre bonté naturelle, et par la memoire honorable de ce grand Pelion vostre pere, de prendre pitié de ma vie et joindre vostre prudence à mon desir, afin de me sortir de ceste fascheuse prison, car telle puis-je dire la demeure que je fais en ce lieu.

Adamas, tres-aise d’ouyr l’affection dont il le supplioit, l’embrassa, et le baisa au front, et puis luy dit : Ouy, mon enfant, soyez asseuré que je feray ce que vous me demandez, et qu’aussi tost que vostre mal le vous permettra, je vous faciliteray les moyens pour sortir sans effors de ce lieu. Continuez seulement en ce dessein et vous guerissez.

Et apres plusieurs autres discours, il le laissa, mais avec tant de contentement, que si Adamas le luy eust permis, il se fust levé à l’heure mesme.

Cependant Leonide, qui ne vouloit laisser Galathée plus longtemps en l’erreur où Climante l’avoit mise, le soir qu’elle vid Silvie et le petit Meril retirez, se mit à genoux devant son lict, et apres quelques discours communs, elle continua : O madame, que j’ay appris de nouvelles en ce voyage ! et des nouvelles qui vous touchent, et ne voudrois pas, pour quoy que ce fust, ne les avoir sceues, pour vous destromper. – Et qu’est-ce ? respondit la nymphe. – C’est, adjousta Leonide, qu’il vous a esté fait la plus grande meschanceté que jamais