Page:Urfé - L’Astrée, Première partie, 1631.djvu/560

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ma gloire ; si bien que ne pouvant refuser a mon affection la curiosité de savoir comme madame se porte, apres vous avoir mille fois baisé la robbe, je vous presente toutes les bonnes fortunes, dont les armes m’ont voulu favoriser,et les offre à vos pieds, comme à la divinité dont je les recognois. Si vous les recevez pour vostres, la renommée les vous donnera de ma part, qui me l’a promis ainsi, aussi bien que vous l’honneur de vos bonnes graces á vostre tres-humble serviteur.

Je me soucie fort, dit alors Galathée, ny de luy ny de ses victoires, il m’obligerait d’avantage s’il m’oublioit. – Pour Dieu, madame, dit Leonide, ne dites point cela. Si vous sçaviez combien il est estimé, et par Meroüé et par Childeric, je’ne sçaurais croire (estant née ce que vous estes) que vous n’en fissiez plus de cas que d’un berger, mais je dis berger qui ne vous aime point, et que vous voyez souspirer devant vous, pour l’affection d’une bergere. Vous croyez que tout ce que je vous en dy, soit par artifice. – Il est vray, dit incontinent Galathée. – Et bien, madame, respondit-elle, vous en croirez ce qu’il vous plaira, si yous jureray-je sur tout ce qui est plus à craindre aux parjures, que j’ay veu à ce voyage, par un grand hazard, ce trompeur de Climante, et cet artificieux de Polemas, parlans de ce qui vous est arrivé, et descouvrants entre eux toutes les malices dont ils ont usé. – Leonide, adjousta Galathée, vous perdez temps; je suis toute resolue à ce que je veux faire,ne m’en parlez plus. – Je le feray, madame, comme vous me le commandez dit-elle, si me permettrez-vous encor de vous dire ce mot. Qu’est-ce, madame, que vous pretendez faire avec ce berger ? – Je veux, dit-elle, qu’il m’aime. -Et en quoy, repliqua Leonide, desseignez-vous, que ceste amitié se conclue ? – Que vous estes fascheuse, dit Galathée, de vouloir que je sçache l’advenir ! Laissez seulement qu’il m’ayme, et puis nous verrons