Page:Urfé - L’Astrée, Première partie, 1631.djvu/574

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vray que celuy de mon maistre estoit fait de sisymbre, et celuy d’Amerine, de la picquante et douce aspharagone. Devant le chariot marchoit toute leur famille, et après suivoient leurs parents, et proches, alliez, et amis.

En ce triomphe ils arriverent au temple, et furent menez à l’autel d’Hymen, au devant duquel cinq torches estoient allumées. Au costé droit d’Hymen, on avoit mis Jupiter et Junon, au gauche, Venus et Diane. Quant à Hymen, il estoit couronné de fleurs et d’odorante marjolaine, tenant de la main droite un flambeau, et de la gauche un voile de mesme couleur à celuy qu’Amerine portoit, comme aussi les brodequins qu’il avoit aux pieds.

Dés lors qu’ils entrerent dans le temple, la mere de Lydias et d’Amerine allumerent leurs torches. Et lors le grand druyde s’approchant d’eux, adressa la parole à mon maistre, et luy demanda: Lydias, voulez vous bien Amerine pour mere de famille? Il demeura quelque temps sans respondre, enfin il fut contraint de dire qu’ouy. Lors le druyde se tournant vers elle: Et vous; Amerine, voulez vous bien Lidias pour pere de famille? Et luy respondant ouy leur prenant les mains, et les mettant ensemble, il dit: Et moy, je vous donne de la part des grands dieux l’un à l’autre. Et pour arrhes, mangez ensemble le Condron. Et lors prenant le gasteau d’orge, mon maistre le couppa, et l’ayant espars, elle en ramassa les pieces, dont selon la coustume ils mangerent ensemble.

Il ne restoit plus pour parachever toutes les ceremonies, que prendre le vin. Il se tourna vers moy, et me dit: Or sus, amy, pour le plus agreable service que tu me fis jamais, apporte-moy la tasse. Je le fis, helas! par mal-heur, trop diligent. Aussi tost, qu’il l’eut en la main, d’une voix fort haute: O, puissants dieux! qui sçavez, dit-il, qui je suis, ne vengez