Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/1003

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les coups des soldats Romains. Mais je n’eus que huict jours de loisir, et toutesfois ne pouvant souffrir que l’on emmenast Eudoxe; je resolus de combattre une si grande et espouvantable armée avec me si petite trouppe, faisant mon compte que je mourrois les armes en la main pour un subject si honorable, et que jamais ma vie ne sçauroit estre mieux employée. Il advint toutesfois autrement, car m’estant embuché dans un bois qui est sur, le chemin d’Hostie, je vis passer une partie de l’armée en assez mauvais ordre. Mais d’autant que je ne voulois qu’Eudoxe, j’attendis jusques à ce que je vis venir, quelques chariots dans lesquels j’apperceus des dames, et pensant que ce fussent celles que je demandois, je donnay courage à ceux gui estoient aupres de moy, les asseurant que j’avois une grande intelligence dans l’armée des ennemis par le moyen d’olimbre, duquel ils sçavoient la faveur, et que nous ferions aujourd’huy un acte digne du nom Romain. A ce mot, poussant mon cheval, et eux me suivant d’un grand courage, nous chargeons ces chariots à la garde desquels il y avoit plus de dix mille barbares. Je ne vous raconteray point par le menu de quelle sorte cette charge fut faite, car cela n’importe de rien. Tant y a que nous les defismes, et que si Eudoxe eust esté où je pensois qu’elle fust, c’est sans doute que je la delivrois des mains de ces barbares ; mais le malheur voulut qù’elle estoit encores derriere, et que les dames que j’avois veues, estoient