Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/1007

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grand et incroyable secours, et que deceu de ceste sorte, nous nous retirasmes tous trois en la plus proche ville pour faire panser Olirnbre d’une grande blesseure que je luy avois faite à la main, quand il me voulut oster le fer duquel je me voulois tuer. Mais quand je sceus que ce jeune homme estoit Segusien comme vous, et qu’il estoit arrivé au lieu où j’estois par hazard, j’advoue que je pris une plus forte volonté de mourir qu’auparavant, et l’eusse fait, sans ce jeune homme qui s’appelloit Celadon, comme depuis il me dit, qui me presenta tant de raisons qu’en fin je resolus d’attendre la guerison d’Olimbre.

Il y avoit en ce lieu un vieux et sage chirurgien qui pensoit la blesseure de mon amy, auquel l’aage et les voyages qu’il avoit faits en divers lieux, avoient appris beauccup de choses. Cestuycy ne vint pas souvent où nous estions, sans prendre garde à nostre tristesse, et parce que d’une parole à l’autre, on vient quelquefois à descouvrir beaucoup de secrets qu’on voudrait tenir cachez, je ne peus si bien me dissimuler, qu’il ne recogneut en partie le dessein que j’avois. Cela fut cause qu’un jour voyant que la blesseure de mon cher Olimbre ne le pouvoit plus convier de nous venir visiter, estant presque guerie, il me retira à part et me tint ce langage : Seigneur, ne trouvez estrange si je me mesle de vous donner un conseil