Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/112

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force et valeur dontoit les monstres, et par son bien dire attiroit chacun à la verité. De qui doncques en ceste extreme nécessité dois-je plustost requerir l’ayde, que de ce grand heros ? Et d’autant plus librement, qu’ayant, à ce que j’ay ouy dire, aymé une de nos Gauloises, sans doute il ne refusera point à sa consideration, le secours qui luy sera demandé. C’est donc à luy que je recourray, à fin qu’il domte ces esprits monstrueux, et qu’il delie de sorte ma langue, que je puisse vous déduire mes raisons, ou plustost qu’il les vous die luy-mesme avec ma voix. Par ta valeur docques, je te prie, et par la belle Galathée, nostre princesse, ô grand Hercule, je te conjure que tu me delivres de ces monstrueuses amours, et esclaircisses de sorte à ceste grande nymphe la raison que j’ay de me conserver sans aimer ny Thamire, ny Calidon, que j’en puisse recevoir un juste et favourable jugement.

Et pour commencer, à quoy penses-tu, Calidon, quand tu m’appelles devant cet amour duquel tu fais ton juge et ton dieu ? Crois-tu que s’il est le dieu de ceux qui se plaisent à leur perte, son pouvoir s’estende sur nous, qui mesme avons honte que son nom soit en nostre bouche, voire qu’il frappe nos oreilles ? Une fille, Calidon, de qui les actions, et tout le reste de la vie, ont tousjours faict paroistre le mespris qu’elle faict de cet amour, est maintenant appellée