Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/171

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moins secret qu’il étoit, avant que je l’eusse sceu, puis qu’au siecle où nous sommes, l’on ne dit pas seulement tout ce que l’on sçait, mais aussi tout ce qu’on s’est imaginé ? – En cela, respondit Astrée, vous feriez paroistre une grande discretion. – Mais plus encores, dit-il, une grande affection. – Pour la discretion, adjousta Astrée, je l’avoue ; mais pour l’affection, je m’en remets à celle à qui elle s’adresse. – Aussi, repliqua le berger, le dis-je pour elle. Et voudrois, puis qu’il a fallu que Silvandre, autresfois tant ennemy de l’amour, ayme et adore maintenant quelque chose, que pour le moins son amour fust recognue. Et lors s’adressant à la belle Diane, il continua : Mais d’où vient, ma belle maistresse, que vous ne respondez rien à ce que je dis, et qu’il semble que mes discours ne vous touchent point ? – Je croy, respondit Diane, que c’est le desplaisir que je ressens desja de ne devoir plus estre vostre maistresse que douze ou quinze jours. – Si ceste douleur, dit le berger, procede de ceste playe, vous y pouvez aisement remedier, obligeant autant Silvandre par vos faveurs à continuer le service qu’il vous rend, que veritablement vos beautez et vos perfections m’y ont contraint jusques icy. – Ah ! Silvandre, respondit Diane, ne parlons plus de faveurs ny de service, le terme des trois mois de vostre feinte estant passé. Ce vous seroit trop de peine de forcer plus long temps vostre naturel. –