Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/192

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de cette faveur ? – Qu’elle est plus grande que nous ne meritons, respondit Silvandre. – Mais, repliqua Phillis, comment recevez-vous la difference qu’elle met entre nous ? – Commme un fidelle serviteur reçoit ce qui est agreable à sa maistresse. – Ce n’est pas, adjousta la bergere, ce que je vous demande, mais si, voyant la grande faveur que nostre maistresse me fait, vous qui mesprisez si fort la jalousie, n’en avez point de ressentiment ? – Je voy bien, dit-il, que vous mesurez mon affection à la vostre, puis que vous pensez que chose qui plaise à ma belle maistresse me puisse estre ennuyeuse. Et quand cela ne seroit pas, j’aurois trop peu de cognoissance d’amour, si je ne recevois pour tres-grande la faveur qu’elle vient de me faire à vostre desavantage. Diane sousrit oyant ceste response, et Phillis, qui attendoit tout le contraire, en demeura si surprise, que s’arrestant tout court, elle considera quelque temps le berger. Mais luy, recommençant à marcher : Phillis, dit-il, ce rire n’est qu’une couverture de vostre peu de replique ; aussi ne vous ay-je peu jusques icy faire entendre, ny par mes parolles, ny par mes actions, un seul des mysteres d’amour, quelque peine que j’a aye mise. Mais je n’en accuse que le défaut de votre amitié. – Si c’est avec l’entendement, dit Phillis, que nous entendons, il faudroit m’accuser plustost, si je n’entens pas ces mystères, d’avoir