Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/252

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bonne chere, je ne sçavois qu’en penser. Je me retire ce soir sans en sçavoir autre chose, car je ne peus tant faire que de parler à elle en particulier ; je m’en vais donques un peu mal satisfait de ma fortune, mais le lendemain il m’advint une rencontre qui ruina tout le reste de mes affaires.

Estant le matin dans le temple, j’y rencontray Parthenopé, avec une de ses tantes ; et de fortune m’estant mis aupres d’elle, je vis qu’elle me regarda d’un œil qui n’estoit point ennemy. Elle estoit belle, et par consequent de celles que par les loix de ma constance, je suis obligé d’aymer. Cela fut cause que je m’approchay un peu plus pres d’elle ; et lors que je cherchois un subject pour parler, elle s’aprocha et se pancha un peu de mon costé, et me dit : Comment vous trouvez-vous du tournoy ? – Je dois faire cette demande, luy dis-je, aux belles dames comme vous estes, puis que le jugement vous en demeure. – Je ne vous demande pas, me dit-elle, comment vous vous y estes porté, car chacun est tesmoin qu’il ne se pouvoit mieux ; mais je suis curieuse de sçavoir si vous ne. vous estes point trouvé las de la peine que vous y eustes. – Puis que vous’faites, luy repliquay-je, un juge­ment si avantageux pour moy, seroit-il possible que j’en puisse ressentir quelque peine ? Nous estions en lieu, où les longs dis­cours n’est oient pas bien seants ; cela fut cause qu’elle ne me respondit qu’avec un sousris, et en baissant la teste