Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/256

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Et à ce mot, elle luy mit au col celle que j’avois eue de Parthenopé. Ce valet qui se sentit fort honoré de cette faveur, l’en remercia ; et pour luy obeyr, s’en alla courant faire son message à cette fille, qui voyant d’abord son escharpe au col de cet homme, eut opinion que je la luy faisois porter par mespris d’elle. Et depuis, oyant la harangue, cognut bien que cela venoit de Circéne, et que je la luy avois donnée ; ce qui l’offensa de sorte, que jamais depuis je ne peus renouer avec elle, et moins encore avec Circéne, qui se retira tout à fait de moy, quoy qu’elle vist bien que je Paymois d’avan­tage. Mais tenant à cette maxime, qu’il faut hayr ceux que Ton a offencez, sçachant que la trahison qu’elle m’avoit faite, estoit tres- grande, elle ne voulut jamais se fier en moy.

Je fus Contraint de retourner à Palinice, mais je n’y demeuray pas long temps, car le printemps estant desjà assez advancé, et de fortune s’estant trouvé cette année fort beau, un jour ces belles dames, se mettant ensemble plusieurs de compagnie, vou­lurent jouir de la douceur des champs. Et pour y aller plus à leur commodité, entrerent dans un bateau, et remontant contremont le paisible Arar, passoient le temps tantost à la musique des instrumens, tantost à celle