Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/335

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qu’il ne sçavoit qu’en croire. Et puis, disoit-il, qu’il est deffendu d’y entrer à ceux qui ne sont point espris d’un sainct amour, je sçay bien que je suis espris d’amour, mais qu’il soit sainct ou non, certes je n’en sçay rien. – Comment, dit Phillis en sousriant, faute d’amour, ô mon serviteur, fera-t’il que vous nous faussiez compagnie ? – Quant à moy, respondit-il, j’en ay bien tres-grande quantité à ma façon, mais que sçay-je si elle est comme l’entend celuy qui a escrit ces vers ? J’ay tousjours ouy dire qu’il ne se faut point jouer avec les dieux. – Or regarde, Hylas, adjousta Silvandre, quelle honte tu reçois de ton imparfaite amitié en ceste bonne compagnie. – Vrayement, respondit Hylas, tu as raison ; tant s’en faut, si tu prenois mon action comme elle doit estre prise, tu m’en louerois. Car ne voulant point contrevenir au commandement de la divinité qui s’adore en ce boccage, je fais paroistre que je luy porte un grand respect, et que je la revere comme je dois, au lieu que toy, mesprisant son ordonnance, t’en vas plein d’outrecuidance profaner ce sainct lieu, sçachant bien en ton ame, quoy que tu vueilles feindre, que tu n’as pas ce sainct amour qui est requis.

Silvandre alors le laissant : je te respondray, luy dit-il, bien tost. Et lors avec toute la troupe, apres avoir puisé de l’eau en sa main, et s’estre lavé, ils laissent tous leurs souliers, et