Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/370

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n’y a pas apparence qu’un si gentil et parfaict amant vous voulust requerir de quelque chose, à sçavoir qu’il ne vous demandera rien qui contrevienne à l’honneur d’une sage bergere ? – Je le veux bien, dit Phillis, à ceste condition. – Et moy, respondit Hylas, je ne le veux qu’à ceste condition.

Sçachez donc, ma belle maistresse, continua-t’il froidement, que je crois ce lieu estre à la verité un boccage sacré à quelque grande divinité ; car depuis que vous estes entrée dedans, et que Silvandre a leu les loix que j’ay ouyes, je me sens tellement touché d’une puissance interieure que je n’ay point de repos en moy-mesme, me semblant que jusques icy vescu en erreur, me conduisant contre les ordonnances que le dieu qui est adoré en ce sainct lieu a faites à ceux qui veulent aymer. De sorte que je suis tout prest d’abjurer mon erreur, et me remettre au sentier qu’il m’ordonnera ; et n’y a rien eu qui m’ait empesché de le faire cependant que vous estiez dans ce boccage, qu’une chose que je vous declareray. Vous sçavez, ma belle maistresse, que depuis l’heure que vous et mon cœur avez eu agreable que Hylas se dist votre serviteur, je n’ay point trouvé en toute ceste contrée un plus contrariant esprit, ny une humeur plus ennemie de la mienne que Silvandre. Car il ne s’est jamais presenté occasion de prendre le party contraire au