Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/442

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quelle peur j’eus qu’en son transport il n’en dist davantage, ou fist recognoistre que c’estoit de moy de qui il parloit. Toute l’assemblée tourna les yeux sur luy, tant pour sa voix qui estoit pleine de terreur et d’espouvantement, que pour ceste façon de faire du tout inaccoustumée. Mais luy, sans en faire semblant, apres s’estre remis à genoux, laissa parachever le sacrifice. Dieu sçait si cela fit faire de divers jugements à plusieurs ! Et il fut tres à propos pour moy que le voile que j’avois sur le visage, empeschast que l’on ne me vid, car on eust sans doute recognu à ma rougeur que c’estoit de moy de qui il se plaignoit. Et ses amis et ses narens trouverent cette priere hors de saison, et n’attendoient la plus part que la fin du sacrifice pour luy en dire leur advis. Mais ils furent bien deceus, d’autant que se perdant parmy la foule, il se desroba, sans que personne s’en prit garde, et se retirant en son logis, apres avoir donné ordre à ses affaires le plus promptement qu’il peut, il m’escrivit une lettre qu’il mit en sa poche, et reprenant la plume, escrivit ces parolles à Tersandre :

Deffy de Damon à Tersandre

Si l’offence que j’ay receue de vous, n’estoit