Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/553

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premier lieu où je vis jamais Astrée, Diane et Phillis, et si vous eussiez esté avec moy au lieu de Silvie, vous eussiez peut-estre appris plus de leurs nouvelles que nous ne fismes, car lassées du chemin nous nous y endormismes, et cependant ces trois bergeres se vindrent assoir de l’autre costé sans nous avoir apperceues. Et ne faut point douter qu’elles n’y demeurerent muettes, mais par malheur quand nous nous esveillasmes, elles partirent. Il est vray que depuis j’y revins seule au retour de Feurs, et ce fut lors que vous me rencontrastes, et que j’y apris bien des nouvelles de Diane ! – Ah ! ma sœur, me dit-il soudain, que j’ay bonne memoire de ce que vous me dites ! Ce fut au temps que je commençay d’aymer autruy plus que moy-mesme. Mais par la chose que vous aymez le plus, je vous supplie de me dire ce que vous en sçavez. Ayme-t’elle quelque chose ? – Voyez, luy respondis-je en sousriant, comme vous estes desja devenu jaloux, et que seroit-ce de vous, si vous en sçaviez davantage ? Contentez-vous que je vous en diray ce que je cognoistray estre necessaire que vous sçachiez. – Mauvaise sœur ! me dit-il, vous me traittez comme les enfans ausquels on monstre des pommes pour leur en donner seullement envie, et apres on les leur refuse.

– Aussi, luy dis-je, les amants ne sont guiere differents des enfans. – Et quoy ? continua-t’il, je ne sçauray donques