Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/986

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d’Isidore.

Quoy que ceste nuict fut penible et pleine d’alarmes pour la belle Eudoxe, si advouay-je n’avoir jamais passé une plus douce nuict, car j’eus continuellement la main dans son sein, et la bouche jointe à la sienne. Amour sçait quels furent mes transports, et combien de fois je faillis de perdre tout respect. Elle le recogneut, lors que sentant ses deux filles endormies, je voulus couler une main par la fente de sa robbe, car me prenant doucement la main, elle joignit sa bouche contre mon oreille, et me dit le plus bas qu’elle peut telles parolles : Et quoy, mon chevalier, ne vous semble-t’il point que Dieu soit assez courroucé contre moy, sans que vous attiriez sur ma teste par des nouvelles offences de nouveaux chastimens ? A ce mot elle se teust, et remit sa teste où elle la souloit avoir, me donnant un baiser qui me rendit bien tesmoignage qu’elle m’aymoit, et moy apres ceste faveur, joignant de mesme ma bouche contre son oreille, je luy dis : Mais, ma belle princesse, quelle offence semit-ce, puis que vous n’estes plus à personne qu’à vous-mesme ? Voulez-vous, peut-estre, que j’attende que vous soyez encores à quelqu’un qui vous possedera devant mes yeux ? Est-il possible que vous vous reserviez de ceste sorte pour ceux qui ne vous aymerent jamais ?

Elle alors, haussant la bouche contre mon orese : Mon chevalier, me dit-elle, n’offençons point