Page:Uzanne - Son altesse la femme.djvu/25

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Altesses et Siresses qui me baillez audience en vostre chaire auprez du feu, prestez-moy souëfve attention. Si ie ne vous chatouille délicatement la rate prouvocatrice des ris, point aultrement ne vous taquineray la lacrymale glande. Il fault que bavardaige d’auteur ayt son cours comme rivière de Loyre ou caquetaige de femme, c’est le pourquoy (sans plus nous admuser aux baguenauldes de l’huys) ie vous soubhaite et coniure de vous tenir esveillez tout le long de ceste histoyre ainsy que pottée de souris ou chat qu’on chastre, car il me chault grandement de vous veoir enlyessés au poinct de rire, non pas seulement du bout des dents comme une vieille idole, mais avecques tant moult esclat que si ie vous desbagoulois mille sornettes dignes de faire pasmer d’ayse tous les fols, les mignons goguelus et festus de la Chrestienté.

Ça, ne battelons plus et venons à iubé. Ie tire resvérences, et sans plus esperonner votre curiousité, ie m’en vay hystorier tout aussitost comme la mère Grand faisant récits à ses petits enfans :

Le docteur Iehan Manigarole, lequel vescut sa vie entière en estat de bachelaige, avoit esté dans son primetemps ung ioyeux escholier, ballant et drillant là où souffloit le plaisir et ne hochant point du nez sur les bonnes et douces chouses. Nul ne sçavoit mieulx que luy savantement mettre a quia flacons, bassins, hanaps ou pintes, aussy bien que filles, femmes et archers du guet.