Page:Véron - Mémoires d’un bourgeois de Paris, tome 1.djvu/9

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sa vie à écrire six volumes pour s’exposer, peut-être, au dédain d’un public distrait, dont la sympathique attention est d’ailleurs si légitimement réclamée par nos écrivains en crédit.

Quelques-uns s’étaient d’abord imaginé que je demanderais le succès de ces Mémoires à des indiscrétions sans mesure et à l’attrait du scandale. Ce n’eût été ni respecter le public ni me respecter moi-même. — Vous ne nous dites pas tout ce que vous savez, me reproche-t-on quelquefois. — Cela est vrai ; mais si ces Mémoires obtiennent quelque approbation des honnêtes gens, ce sera peut-être moins pour ce qu’on y trouve que pour ce qu’on n’y trouve pas. C’eût été bien certainement donner une fausse idée des quarante dernières années de notre temps que d’accorder trop de place à ces excentricités de vices et de scandales qui se reproduisent à toutes les époques, et, comme des gaz impurs, montent, se dégagent à fleur d’eau, sans laisser trace de leur passage. Répudiant toute ressemblance de mœurs et de goûts avec le dix-huitième siècle, nous ne portons plüs ni talons rouges, ni mouches ; hommes et femmes ne s’affublent plus de paniers ou de larges basques d’habits qui ne permettaient de s’asseoir que sur de spacieux fauteuils. Simple, modeste dans son costume, no-