Page:Variétés Tome I.djvu/358

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Contre Boscot Polichinel, marchant de mort-aux-rats, défendeur, accusé.

Ma cause, Messieurs, est d’autant plus importante, qu’il s’agit non seulement de la vie de cette pauvre dame Chatte, ma partie, et de celle de six petits chatons, orphelins, ses enfants, issus du plus noble sang de la race des chats, mais encore de la tranquillité de la France, de l’Europe entière ; que dis-je ? de tout l’Univers, que le malheureux Polichinel a troublé par des crimes effroyables.

Un des plus graves, et qui trouble le plus la société, est qu’il a tué et assassiné, dans cette ville, le jour de Carême prenant de l’année mil sept cent je ne sais combien, le fameux Mitoulet, mari de celle pour qui je parle, le plus fidèle sujet, le plus intelligent et le plus valeureux capitaine qui ait jamais paru dans les armées des chats ; un chat, Messieurs, qui, comme le plus habile politique de la nation chatonne, avoit plusieurs fois été élu pour deputé vers les alliés, quand il s’agissoit d’y négocier quelque affaire importante pour la conservation de sa République, et qui, par surcroît de dignité, avoit passé par toutes les principales charges de la communauté des chats, et exercé, avec un jugement dont il se voit peu d’exemples, la marguillerie dans leurs assemblées nocturnes, je veux dire dans les sabats. Et pour comble de cruauté, et non content d’avoir massacré le mari de celle pour qui je parle, il a encore arraché les ongles de ma partie.

Si l’on mesure la punition du coupable à la qualité de la personne envers laquelle le crime a été commis, après ce que je viens d’avoir l’honneur de pro-