Page:Variétés Tome I.djvu/359

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duire aux yeux de la Cour, il me paroît douteux qu’on puisse inventer un supplice assez affreux pour cet accusé.

Eh ! quel motif a porté cet infâme meurtrier à massacrer ce héros, ou, pour mieux dire, à désoler cette famille entière ? Vous ne le croiriez pas, Messieurs : le plus vil intérêt. Cet opérateur, cet empirique, en un mot ce marchand de mort-aux-rats, ne s’est porté à cet assassinat que pour mieux parvenir à débiter sa drogue. Le fameux Mitoulet étoit l’ennemi juré des rats ; autant il en trouvoit, autant étoient-ils croqués par sa dent meurtrière. Mitoulet étoit le rempart le plus assuré de cette ville ; il nuisoit par là au commerce et à la réputation de Polichinel. Personne n’étoit curieux d’acheter de la mort-aux-rats : Mitoulet suffisoit pour les détruire.

Voilà, Messieurs, voilà la source et la cause de la haine de Polichinel : il regarda cet illustre défenseur comme son plus mortel ennemi ; Polichinel périssoit si Mitoulet conservoit des jours précieux. Il ne lui en fallut pas davantage pour l’engager à commettre le plus grand de tous les crimes, en portant ses mains hardies sur la personne de Mitoulet.

Eh ! que deviendra la société, s’il est ainsi permis de massacrer ses plus grands bienfaiteurs, et si notre interêt nous engage à donner la mort à tous ceux qui peuvent nous nuire ?

Marchands, puisque la notable race des chats est éteinte, qui mettra désormais vos marchandises à couvert de la morsure des rats ?

Soldats ! qui veillera à la conservation de la bourre et de la mèche de vos mousquetons ?