Page:Variétés Tome III.djvu/247

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Ce qui plaisoit hier aujourd’huy est difforme.
Je les ay fait porter larges, longs, courts, estroits,
Je les ay fait changer de colet mille fois,
Tantost façon de dents, maintenant de rondace10 ;
La nouvelle tousjours est de meilleure grace.
J’ay fait les aillerons larges d’un demy-pié,
Mesmes souvent pendans du bras jusqu’à moitié.
Pour un temps l’esguillette y a esté prisée,
Qui maintenant n’y sert de rien que de risée.
Les aillerons estroits sont les plus estimez.
Les busques ne sont plus comme jadis aymez.
Avec quoy l’on avoit accoustumé paroistre,
Les plus estroits pourpoints sont ceux qui sont en estre.
J’ay avec le trenchant decouppé leur satin
Pour monstrer le taftas bleu ou incarnadin
Qu’ils font mettre dessous ceste large taillure,
Qui est, à vray parler, vanité toute pure11 ;
Encor cela est-il peu prisé si l’on n’a
Le satin verd aux gans ou velours incarna,
Ou bien de franges d’or une paire bordée12
Qui porte sur le bras une demy-coudée.
Pour se ceindre l’on a quitté le taffetas ;
Personne maintenant n’en fait guère de cas,



10. Rondache, bouclier rond.

11. « Chouse (la mode) a encore fait ceci de bon, qu’elle a ramené l’antique origine des François, descendus de la belliqueuse nation d’Allemagne ; car les hommes s’accoustument à porter chausses bouffantes de taffetas ou velours sortant par fentes dehors. » (La Mode qui court, etc., p. 6.)

12. Ces gants à franges étoient depuis long-temps à la mode. Dans une très curieuse pièce parue en 1588, le Gan de Jean Godard, Parisien…, nous lisons (ad finem) :