Page:Variétés Tome IV.djvu/278

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les autres, moins subtilisées, se contentoient de la parade ; toutefois le temps, quy nous faict desdaigner une mesme viande et apprendre des nouvelles fausses, faict souvent naistre des repentirs à celles quy ne voyoient point croistre la creste à leur allié, et que veritablement et d’effect elles mangeoient leurs poissons sans sauce. Ce repentir engendre des regrets, ces regrets engendrent des plaintes, et ces plaintes engendrent des controverses.

Mais, comme elles en estoient en ces termes, les Chapons eurent quelque divorce avec les Coqs, touchant la primauté. Les Coqs, fondez en bonnes raisons, demandoient la preeminence, et les Chapons, orgueilliz de quelque vanité, ne vouloient estre seconds qu’à eux-mesmes. Ils vindrent premierement aux reproches, et puis aux coups ; mais les Coqs, comme en mespris des Chapons, faisoient monstre de leurs crestes, disant que cela leur devoit faire bonne honte et peur tout ensemble. Les Chapons, se sentant chatouillez de si près, commencèrent à drapper les Coqs, disant que ce qu’ils jugeoient l’ornement de leurs testes estoit la defformité de leur sexe, et qu’on leur en avoit faict une synderèze2 pour embellir cette laideur, et qu’ils en estoient mieux venuz auprès des Poulles, leurs becs estans moins rudes. Les Coqs, en contr’echange, les voulant tou-


2. Ce mot de la langue dévote, qui signifie reproche secret, remords de conscience, est ici singulièrement placé. Regnier, satire 13, v. 22, s’en est servi ; Regnard aussi, dans le Joueur, acte 5, scène 4, mais tous deux de manière à faire voir qu’ils en comprenoient le sens.