Page:Variétés Tome IX.djvu/209

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Le Bourgeois.

Messieurs, ce sera donc pour vous obéïr : j’aime mieux faire l’incivil que l’importun[1]. Là, Messieurs, ne laissons point froidir les viandes, elles n’en seroient pas meilleures. Messieurs, lavons, s’il vous plaist. Là, Monsieur, mestez-vous là.

Le premier Convié.

Monsieur, quand vous aurez pris vostre place.

Le Bourgeois.

Non, Messieurs, je n’ay garde. Je vous supplie, ne perdons point de temps. Messieurs, vous estes venus pour faire penitence.

Le second Convié.

La penitence est bien douce à faire, Monsieur.

  1. C’étoit un compliment bourgeois, dont Caillières conseille à la bonne compagnie de se garder : « Il est vray, fait-il dire au commandeur, qu’il ne suffit pas de sçavoir les bonnes façons de parler pour s’en servir : il faut connoître les mauvaises pour les éviter, surtout certains dictons, qui font l’ornement des discours de la bourgeoisie, et dont M. Thibault nous a donné un exemple lorsqu’il a dit à madame qu’il vaut mieux être incivil qu’importun. » (Du bon et du mauvais usage dans les manieres de s’exprimer, Paris, 1693, in-8, p. 114.) Molière, à qui rien n’échappoit, n’a pas manqué de mettre cette banalité bourgeoise dans la bouche de M. Jourdain (Bourgeois gentilhomme, acte III, sc. 4). C’est un trait de caractère que les commentateurs auroient bien fait de remarquer au passage. Il y avoit, du reste, longtemps que ce lieu commun poli circuloit dans la bourgeoisie françoise et angloise. Écoutez