Page:Variétés Tome V.djvu/234

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Mais, les jours consacrez par Dieu même au repos,
Les ouvriers, munis d’une succincte messe,
Viennent avidement faire rouler la presse,
Et me font prendre part à la peine qu’ils ont,
Pendant que pour eux seuls est le revenant bon.
Les dimanches il faut qu’eveillé de bonne heure,
Je quitte au point du jour mon humide demeure.
Si je tarde, j’entens notre prote abboyer.
Devinant aisement que c’est pour nettoyer,
Je me prepare encore à ce nouveau deboire ;
Je m’arme du balay, je prens la ratissoire ;
Je commence d’abord à lever tous les ais,
À les bien ratisser et les rendre bien nets.
Curieux de sçavoir si dans l’imprimerie
Tout est mis et rangé par ordre et symetrie,
Le prote me vient voir, et regarde avec soin
Si j’ay bien balayé par tout dans chaque coin.
Pour abattre, dit-il, les toiles d’araignée,
Faites faire au houssoir une longue trainée,
Et souvenez-vous bien que tous les quinze jours
Il faut avoir le soin de balayer les cours.
De crainte qu’après moy sans relâche il ne crie,
Je fais ce qu’il me dit. J’entre en la tremperie,
J’entasse les papiers, je vuide le fourneau,
Et, rinçant tous les seaux, j’y mets de nouvelle eau.
J’amasse en un papier toutes les baliûres,
Et dès le lendemain, épluchant mes ordures,
Je jette chaque lettre au gré de son destin,
La mechante à la fonte et la bonne au castin.
Ce qui par dessus tout me gêne et me desole,
C’est le rude embarras que me donne la colle :
Car, étant obligé de la faire au logis,