Page:Variétés Tome V.djvu/277

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d’un chemin en un autre, et d’un autre en un autre, accusant un peché, ce peché les conduit en un autre, et cet autre en un autre, de sorte que l’on ne peut sortir de ce tortueux labirinthe qu’avec grande difficulté.

D’autre costé, les bouchers, poullayers, charcuitiers et paticiers, ayans eu la commodité d’user les semelles de leurs souliers à force de leur pourmener, de faire une illiade de brochettes de bois et de degresser leurs estals, assomment, tuent, esgorgent, plument, couppent, dehachent, et parent leurs boutiques de bœufs, de moutons et de pourceaux mis en mille pièces, de façon qu’ils chantent le Te Deum laudamus, au lieu de faire dire des vigiles pour luy.

Neantmoins, de toutes les personnes qui se trouvent de repos et de la confrarie de Jean de Loisir, tant à cause du caresme que pour l’occasion de la marchandise qui ne va pas si bien que l’on voudroit, il n’y en a point qui rendent meilleur service au roy que ces braves atlettes qui vont en garde pour les bourgeois. Leurs corps sont infatigables au travail, leurs yeux au sommeil et leur vie à la peine, et ne se plaisent rien tant qu’à coucher sur la dure, d’avoir le mousquet sur l’espaule et l’espée à leur costé de fer, fit d’estre sans cesse en faction avec grande sobriété. Mais où m’emporte mon discours ? Retournons à nos moutons : c’est une marchandise propre à ces messieurs dont j’ay traicté dans ce purgatoire, lequel je leur dedie, car je croy, par metaphore, que le caresme ne semble moins long, et ne fache moins ces messieurs les bouchers, charcuitiers, cui-