Page:Variétés Tome V.djvu/303

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sante au commandement qui lui estoit faict, après avoir coloré son teinct d’une couleur vermeillette, et comme baissant la teste, dict : Ce n’est pas que mon desir glouton ne sçache bien se contenter, et que le garçon de la boutique ne calfeutre aussi bien mon bas que maistre juré qui soit au mestier de cultis ; mais je ne puis souffrir qu’une truande s’engresse à mes despens, et qu’une telle maraude souille l’honneur de mon lict. Je suis contraincte de l’appeller pardevant vous, en vous remontrant combien de fois je les ay surprins dedans le magasin, où, allant pour quelques affaires, je les avisois par le trou de la serrure (car ils avoient verrouillé la porte sur eux) qui touchoient si rudement que c’estoit pitié de les voir. Je ne sçay où ils pretendoient gister ce jour-là, mais ils doubloient fort le pas ; mais entr’autres, une fois, se doubtant que ceste place n’estoit pas de grande resistance, et que les soldats estoient là à decouvert, ils montèrent plus haut au grenier, puis s’enfermèrent dans une tonne vuide, où après quelques coups fourrez, ils s’estocadèrent si rudement que, roulants sur le plancher en ceste tonne, cela fit un grand bruict. Ce qu’entendant, je monte droict en haut, où je vis ceste tonne courir ça et là sur le plancher ; ne sçachant que c’estoit, je voulus conjurer le diable de sortir de là dedans, où, après quelques conjurations, j’apperceu sortir un des pieds de mon mary, passé entre les jambes de ma drôlesse. Ah ! quel crève-cœur ! Depuis trois ans que je suis avec luy, je n’ay eu qu’un enfant ; encor est-il fluet qu’il ne se peut soustenir.

Voire vrayment (dict madame Charlette, femme