Page:Variétés Tome V.djvu/305

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derrière le long d’une tapisserie jusqu’à la porte, et ainsi gaigna le haut. Bon Dieu ! que je l’eusse pelottée si elle ne se fust esquivée, et que je luy eusse donné de gourmades ! Encores passe pour un coup, mais je vous laisse à penser si c’est là la première fois !

Une certaine P., portant je ne sçay de colère sur sa face, allongea le col, puis dict : C’est assez patienter. Ce vilain ruffien, non content d’en avoir jusqu’aux bretelles, toutes les nuicts se lève du lict, puis, feignant d’avoir un cours de ventre, va droict à la garde-robbe, où, le rendez-vous estant avec une de mes filles de chambre, l’enfile avec tant de zèle que l’on diroit qu’il enfileroit des perles ; mais, comme il demeuroit trop long-temps en son embarquement, je l’allay trouver, où je le vis tout estendu et se tourmentant comme un malade de sainct9. J’eus souleur. À l’heure j’appellay Guillaume, Janne, Pierre, Jacques, cocher, laquais, et recognu enfin que c’estoit. La pauvrette, de honte qu’elle avoit, se print à plorer, et troussa sa chemise par devant pour s’en cacher la face10. Dieu sçait comme je l’accommoday ! Je fis venir tous les valets d’estable, qui luy donnèrent cent coups d’estrivières et luy arrachè-


9. C’est-à-dire atteint d’épilepsie. On donnoit ce nom de mal de saint à certaines maladies, telles que le mal saint Mathelin, qui étoient placées sous l’invocation de tel ou tel patron. V. Ancien théâtre françois, t. 2, p. 415.

10. Dans les Fantaisies de Bruscambille et dans une pièce du même temps, Complexions amoureuses des femmes, etc., se trouve la même plaisanterie sur les filles qui, par pudeur, se couvrent les yeux avec leur chemise.