Page:Variétés Tome X.djvu/144

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Te feront des presens, et seras à leurs gages.
Mais si tu veulx au jour quelque chose éventer,
Il fault premièrement la fortune tenter,
Sans y mettre ton nom, de peur de vitupère
Qu’un enfant abortif porte au nom de son père ;
Car en celant ton nom, d’un chacun tu peux bien
Sonder le jugement, sans qu’il te couste rien.
D’autant que tels escripts vaguent sans congnoissance
Ainsi qu’enfans trouvez, publiques de naissance.
Mais ne faulx pas aussi, si tu les voids loüer,

Maistre, père et autheur, pour tiens les advoüer.

Le plus seur toutefois seroit en tout se taire,
Et c’est un beau mestier, et fort facile à faire,
Le faisant dextrement. Fay courir qu’entrepris
Tu as quelque poëme et œuvre de hault pris,
Tout soudain tu seras montré parmy la ville
Et seras estimé de la tourbe civile.

Un vieulx ruzé de court naguières se vantoit
Que de la republique un discours il traitoit ;
Soudain il eut le bruit d’avoir épuisé Romme,
Et le sçavoir de Grèce, et qu’un si sçavant homme
Que luy ne se trouvoit. Par là il se poussa,
Et aux plus haults honneurs du palais s’avança,
Ayant mouché les roys avec telle practique,
Et si n’avoit rien fait touchant la republique.
Toutefois cependant qu’il a esté vivant,
Il a nourry ce bruit qui le meit en avant.
Jusqu’à tant que la mort sa ruse eut descouverte,
Car on ne trouva rien en son estude ouverte,