Page:Variétés Tome X.djvu/15

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Monsieur disoit que rien n’estoit cuit ou bon, ou que la viande sentoit le reland13, ou que tout estoit trop salé, le maistre d’hostel, qui sçavoit la cause d’où provenoit toutes ses deffectuositez, ne disoit pas que c’estoit l’amour du cuisinier qui rendoit ainsi les viandes mal apprestées, mais au contraire faisoit ses excuses envers Monsieur, disant que c’estoit le temps qui en estoit la cause, ou que le cuisinier se portoit mal, que le bois estoit vert, que par malheur il estoit arrivé que le pot s’estoit cassé en voulant dresser le potage, qui faisoit que le bouillon n’estoit pas si bon qu’il devoit estre, d’autant que la graisse estoit perduë, tant y a que toutes les meilleures excuses qu’il pouvoit trouver pour le cuisinier, il le faisoit, afin que reciproquement le cuisinier excusat ses deffauts envers son seigneur, et pour ne pas luy reveler que le maistre d’hostel se promenoit tous les jours avec sa maistresse, ou bien qu’il s’estoit fait une bonne collation aux depens du seigneur.

Cependant que la fille de chambre carressoit le valet de mesme condition, que le cocher avec une semblable à luy, que les chevaux, mal pensez, n’estoient pas le plus souvent visitez de l’escuyer, qui, pour s’en rapporter au pallefrenier, passoit legerement par dessus la sujection de sa charge, ayant d’autres affaires plus pressantes en ville que celle-là. Cependant il donne ou fait donner tout ce qu’il faut, sans regarder les parties du charon et du ma-


13. C’est-à-dire sentir le gâté, le renfermé. V. l’Ancien Théâtre de la Biblioth. Elzévir., t. VIII, p. 77.