Page:Variétés Tome X.djvu/243

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que j’avois separée des autres, prenant brusquement la parole pour toutes, me parla de cette sorte :

——--Comme je te connois discret,
——-- Je t’avertis en confidence ;
—-Mais n’en dis rien, car c’est un grand secret :
À tort vous nous croyez manquer de connaissance ;
——--La pluspart des hommes sont fous,
——--Car, bien que nous sçachions nous taire,
——--Nous voyons ce qu’ils font pour nous,
——--Et savons ce qu’ils nous font faire.

Je fus fort epouvanté d’une nouveauté si extraordinaire ; bien que je n’ignorasse point que les pistoles se mêloient de beaucoup de choses, je ne sçavois pas encore qu’elles sçussent parler. Mais enfin, m’étant un peu rassuré, je lui repartis : « Eh quoi ! as-tu bien assez d’esprit pour repondre à toutes les questions que je te ferai ? »

Alors, avec ardeur reprenant la parole ;
—-« Je dirai d’or ! » repliqua la pistole.

« Vraiment, lui dis-je, tu ne te contentes pas de parler, tu fais des vers, et, qui pis est, tu fais des pointes ! Mais, puisque te voilà de si belle humeur, je suis prêt à t’écouter. Je ne serai pas le premier qui me serai engagé dans des dialogues extraordinaires ; en tout cas, puisqu’il y en a dans Lucien d’aussi surprenans, il sera mon garant. Surtout, si tu me veux plaire, entretiens-moi de diverses choses dont tu peux avoir connoissance ; conte-m’en des