Page:Variétés Tome X.djvu/274

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que c’estoit le ramage d’un oiseau passager que l’on avoit sifflé à la perche, et appris un françois corrompu, tel que le vieil normand que l’on parloit du temps de Guillaume le Conquerant, un langage d’outre mer, qui ne venoit ny du Levant, ny du Midy, mais du Septentrion, de bise ou Soubise9. Cet oyseau s’estoit essoré l’aisle sur une roche, et à ses vervelles10 il y avoit, en grosses lettres : Roche Aisle ; il estoit de la grandeur d’un tiercelet11, se disoit souverain de l’aigle, le pelican des chrestiens, la colombe qui porta le rameau d’olive hors de l’arche de Noé, et se donnoit mille autres fanfares et banderolles de vanité ; hagard neantmoins et mal leurré pour gibier sur terre ; fort bon pecheur, neantmoins il ne valoit rien que sur la marine, car sur terre il estoit tanquam piscis in arido ;


9. Allusion par équivoque au duc de Soubise, qui, avec son frère ainé le duc de Rohan, avoit fait alliance avec l’Anglois et s’étoit mis en guerre ouverte contre le roi. Richelieu n’ignoroit rien de ses menées ; il savoit notamment qu’il avoit fait main basse sur plusieurs vaisseaux français. Pour toute réponse à cet acte de rebelle, il s’étoit contenté d’écrire, vers le milieu de juillet de cette année, à M. de Maillezais, « fera venir un commissaire pour raser Soubise. » C’étoit la demeure seigneuriale du duc sur la Charente, près de Marennes. (Avenel, Lettres, instruct. diplomat. et papiers d’État du Card. de Richelieu, t. II, p. 506.)

10. C’étoient les anneaux ou plaques que l’on attachoit aux pieds de l’oiseau de proie, avec l’empreinte des armes du seigneur auquel il appartenoit.

11. On appeloit tiercelet le mâle des oiseaux de proie : faucons, autours, gerfauts, éperviers.