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Page:Vaudon - Monseigneur Henry Verjus, 1899.djvu/311

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RABAO

Le P. Navarre, moins fâché de la perte de l’ancre que désolé d’un contre-temps dont ses pauvres confrères de Nouvelle-Guinée pouvaient être victimes, se hâta de réparer le bateau et de le pourvoir d’une ancre neuve. On était au 6 septembre. Maintenant, partez et volez au secours des Missionnaires !

Hélas ! de nouvelles difficultés, venant cette fois des étrangers et des mariniers eux-mêmes, et dont nous ne trouvons le détail ni dans les papiers du P. Verjus ni dans les notes du P. Navarre, retardèrent encore le départ. Le 7, tout était prêt. L’équipage voulut passer le 8 au port. Le lendemain, le surlendemain, il est encore là. Enfin, le 10, muni de toute autorisation officielle, il se décide ; on aurait pu encore, d’après les calculs du P. Verjus, avec de la bonne volonté, arriver à temps ; elle manqua. Le Gordon rencontra en mer l’Ellangowan qui ramenait le Père malade et les deux Frères plus morts que vifs. Quelle rencontre ! Le P. Verjus en avait eu le pressentiment. Écoutons-le racontant lui-même cet épisode émouvant :

« Le 16, vers midi, je vis une voile à l’horizon. Le bateau venait dans notre direction. On regarde la carte. « L’endroit est trop profond, dit le capitaine ; ce bateau n’est pas « là pour la pêche… Il va en Nouvelle-Guinée !… » Je priai alors de virer un peu du côté du bateau qui était sur notre gauche. On vire, en effet, et, après quelques manœuvres, on fut assez près pour parler. « Où allez-vous ? cria le « capitaine. — À Yule-Island », répondirent les Manillois. Mais le capitaine comprit Murray-Island pour Yule-Island. « C’est bien, s’écria-t-il, passez votre chemin », et il mit de nouveau le cap sur Thursday ; mais, moi qui avais bien entendu, et qui, de plus, avais reconnu le Gordon et Pedro, notre capitaine, je protestai énergiquement. Le capitaine de l’Ellangowan, qui se croyait sûr de son fait, fut un peu choqué, et ce n’est que sur de nouvelles instances qu’il consentit à un nouvel abordement, en y mettant pour condition qu’il parlerait le premier, et en anglais. On vira encore une fois, et, dès que, de nouveau, le Gordon fut près