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Sa marche à lui, immense et monotone,
À travers la fureur et l’effroi de l’automne.

Le premier arbre est grand d’avoir souffert :
Depuis longtemps, c’est dans ses branches
Que les hivers
Prenaient, des beaux étés, leurs sinistres revanches :
Contre lui seul, le Nord
Poussait d’abord
Et ses rages et ses tempêtes
Et quelquefois, le soir, il le courbait si fort,
Que l’arbre immensément épars sous la défaite
Semblait toucher le sol et buter dans la mort.
L’orage était partout et l’espace était blême ;
L’arbre ployé criait, mais redressait quand même,
Après l’instant d’angoisse et de terreur passé,
Son branchage tordu et son front convulsé.
Grâce à sa force large et mouvante et solide,
Il rassurait tous ceux dont il était le guide.
Il leur servait d’exemple et de gloire à la fois.

Au temps de l’accalmie, ils écoutaient sa voix