Page:Verlaine - Œuvres complètes, Vanier, V.djvu/156

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
144
confessions

de fièvre aiguisait en ce moment me disaient des choses qu’exprimait à peine la voix quasiment éteinte.

« Ce ne sera rien. Ne craignez rien. À propos, c’est pour demain les publications ? Oui ? Oh tant mieux ! Je suis un peu fatiguée, le docteur m’a dit d’essayer de dormir, je n’ai pas pu de toute la journée, mais à présent que je vous ai vu et parlé, je suis si contente que je vais m’assoupir en pensant à vous. À demain, sans faute, surtout ! »

Le lendemain était un dimanche. J’étais libre toute la journée et toute la soirée. En me reconduisant, le père me confia qu’il craignait que ce ne fut la petite vérole. Les gens de mon âge se souviennent que cette épidémie sévissait dès lors à Paris et devait persister jusqu’après la Guerre et la Commune. On juge de mon inquiétude et de mon empressement, dès mon premier déjeuner, après avoir prévenu ma mère que je ne rentrerais sans doute que pour dîner, invité à déjeuner en ville, lui disais-je pour ne pas l’alarmer inutilement, à me rendre rue Nicolet, pour avoir des nouvelles.

La petite vérole s’était manifestement déclarée et du délire commençait.

J’eus toutes les peines du monde à cette fois monter à la chambre de la malade, et cette fois encore ce fut la mère — digne femme et grand cœur à qui tout mon culte est dédié ! — qui m’in-