Page:Verlaine - Œuvres complètes, Vanier, V.djvu/166

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
154
confessions

été le pire, allait donc bien : elle s’y mettant de son tout pauvre cher cœur virginal, moi apportant ce que je pouvais de discrétion affectueuse et d’en quelque sorte amoureuse vénération. Je dis tout ce que je pouvais, car il m’arrivait parfois, vers la fin particulièrement, de me sentir moi-même comme non plus capable de me comporter bienséamment et… sciemment. Dans ces cas je quittais brusquement sous un prétexte bon ou mauvais avec une rapidité qui étonnait alors et dont on me sut gré ensuite. Un jour que ce m’était arrivé, au lieu du baiser sur le front habituel depuis quelques soirées, mes lèvres allèrent, ô sans trop de plus de préméditation que cela, sur ses lèvres qui, dans leur candeur suprême, me rendirent joyeusement mon baiser comme furtif.

Une fois, c’était, je pense bien, deux soirs après ce soir-là, elle parla layettes, langes, berceaux et nom de baptême selon le sexe… J’étais ravi mais un peu étonné. De quoi diable allait-elle s’aviser là ? Et des hum ! hum ! mentaux commençaient à me travailler méchamment, quand, elle, me dit, en forme de conclusion formelle : « Car nous aurons un enfant. » — À quoi je répondis en toute naïveté presque déjà conjugale : « J’espère bien qu’oui et même plusieurs. » Elle alors, empruntant sans, certes, s’en douter, le si drôle vers de la célèbre apostrophe de cet amusant Piron : « Il n’y a pas de