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césar cascabel.

Encore trois cent verstes — une centaine de lieues — et Perm compterait « une maison et une famille de plus dans ses murs ! » comme disait M. Cascabel.

« Ouf !… ajouta-t-il. Une jolie trotte que nous avons faite là, mes amis !… Eh bien ! n’avais-je pas raison ?… Tout chemin mène à Rome !… Au lieu d’arriver en Russie par un côté, nous sommes arrivés par l’autre, et qu’importe, puisque la France n’est pas loin ! »

Et, pour peu qu’on l’eût pressé, l’excellent homme aurait soutenu que l’air du pays normand lui arrivait par-dessus toute l’Europe, et qu’il le reconnaissait à ses senteurs marines !

Au sortir du défilé se trouvait un zavody, composé d’une cinquantaine de maisons et de quelques centaines d’habitants.

Il fut décidé que l’on s’y reposerait jusqu’au lendemain, afin d’y renouveler certaines provisions — entre autres, le thé et le sucre.

En même temps, M. Serge et Jean purent se procurer du plomb, de la poudre, et renouveler les munitions, qui leur faisaient complètement défaut.

Et lorsqu’ils furent de retour :

« En chasse, mon ami Jean ! s’écria M. Serge. Nous ne reviendrons pas le carnier vide !… en chasse !…

— Si vous le voulez », répondit Jean, plutôt par devoir que par plaisir.

Pauvre garçon ! La pensée d’une séparation si prochaine lui faisait prendre toute chose en dégoût.

« Nous accompagnez-vous, Ortik ? demanda M. Serge.

— Volontiers, répondit le matelot.

— Tâchez de me rapporter du bon gibier, recommanda Mme  Cascabel, et je m’engage à vous préparer un bon repas ! »

Comme il n’était que deux heures après midi, les chasseurs avaient le temps de fouiller les bois alentour. Et sous ces épais massifs, si le gibier ne venait pas de lui-même au-devant des coups de fusil, c’est qu’il y mettrait peu de complaisance.