Page:Verne - Clovis Dardentor, Hetzel, 1900.djvu/151

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nistre occasionna, elle fut mise à sac par les Turcs et les Arabes. Sa tranquillité ne date que de la domination française. »

Et Jean Taconnat de penser :

« Tremblements de terre… incendies… attaques !… Allons, j’arrive cent ans trop tard ! » — Est-ce que des secousses se font encore sentir, mademoiselle ?… demanda-t-il.

— Non, monsieur, répondit Mme  Elissane.

— C’est fâcheux…

— Comment… fâcheux ! s’écria M. Désirandelle. Voilà qu’il vous faut des tremblements de terre, monsieur… des cataclysmes de ce genre, monsieur…

— Ne parlons plus de cela, déclara sèchement Mme  Désirandelle, car le mal de mer finirait par me reprendre. Nous sommes en terre ferme, et c’est bien assez du roulis des bateaux sans que les villes s’en mêlent ! »

Marcel Lornans ne put s’empêcher de sourire à cette réflexion de la bonne dame.

« Je regrette d’avoir rappelé ces souvenirs, dit alors Louise Elissane, puisque Mme  Désirandelle est si impressionnable…

— Oh ! ma chère enfant, répondit M. Désirandelle, ne vous reprochez pas…

— Et, d’abord, s’écria M. Dardentor, s’il survenait un tremblement de terre… je saurais bien le mater !… Un pied ici, un autre là… comme le colosse de Rhodes !… Rien ne bougerait… »

Le Perpignanais, les jambes écartées, faisait craquer le parquet sous ses bottes, prêt à lutter contre toute commotion du sol africain. Et de sa bouche largement ouverte sortit un rire si sonore, que tout le monde prit part à son hilarité.

L’heure de se retirer étant venue, on ne se sépara pas sans avoir donné rendez-vous aux deux familles pour le lendemain, afin de visiter la kasbah. Et Marcel Lornans, tout songeur, se répétait en rentrant à l’hôtel qu’un engagement au 7e chasseurs, ce n’était peut-être pas l’idéal du bonheur ici-bas…