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deux ans de vacances.

éparpillées sur les hauteurs, près du village de Mount-Saint-John.

Les deux jeunes Français, Briant et Jacques, sont les fils d’un ingénieur distingué, qui est venu – il y avait deux ans et demi – prendre la direction de grands travaux de dessèchement dans les marais du centre d’Ika-Na-Mawi. L’aîné a treize ans. Peu travailleur quoique très intelligent, il lui arrive le plus souvent d’être un des derniers de la cinquième division. Cependant, quand il le veut, avec sa facilité d’assimilation, sa remarquable mémoire, il s’élève au premier rang, et c’est là ce dont Doniphan se montre le plus jaloux. Aussi Briant et lui n’ont-ils jamais pu être en bonne intelligence au pensionnat Chairman, et on a déjà vu les conséquences de ce désaccord à bord du Sloughi. Et puis, Briant est audacieux, entreprenant, adroit aux exercices du corps, vif à la repartie, de plus, serviable, bon garçon, n’ayant rien de la morgue de Doniphan, un peu débraillé, par exemple et manquant de tenue – en un mot, très français et par cela même, très différent de ses camarades d’origine anglaise. D’ailleurs, il a souvent protégé les plus faibles contre l’abus que les grands faisaient de leur force, et, en ce qui le concerne, n’a jamais voulu se soumettre aux obligations du faggisme. De là, des résistances, des luttes, des batailles, desquelles, grâce à sa vigueur et à son courage, il est presque toujours sorti vainqueur. Aussi est-il généralement aimé, et, quand il s’est agi de la direction du Sloughi, ses camarades, à quelques exceptions près, n’ont-ils point hésité à lui obéir – d’autant plus, on le sait, qu’il avait pu acquérir quelques connaissances nautiques pendant sa traversée de l’Europe à la Nouvelle-Zélande.

Quant au cadet, Jacques, il avait été considéré jusqu’alors comme le plus espiègle de la troisième division – sinon de tout le pensionnat Chairman, sans en excepter Service – inventant sans cesse des niches nouvelles, jouant des tours pendables à ses camarades, et se faisant punir plus que de raison. Mais, ainsi qu’on le verra, son caractère s’était absolument modifié depuis le départ du yacht, sans que l’on sût pour quel motif.