Page:Verne - Histoire des grands voyages et des grands voyageurs, Hetzel, 1870, tome 1.djvu/156

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

citernes, très-nombreuses, y fournissent une eau excellente. La plante tinctoriale nommée l’orseille y croît en abondance. Quant aux habitants de cette île, dont la coutume est d’aller à peu près nus, ils sont grands, bien faits, et leurs femmes, vêtues de houppelandes de cuir qui traînent jusqu’à terre, sont belles et honnêtes.

Jean de Béthencourt, avant que ses projets de conquête fussent dévoilés, aurait voulu s’emparer d’un certain nombre de Canariens. Mais il ne connaissait pas le pays, et l’opération était difficile. Il alla donc mouiller à l’abri d’un îlot de l’archipel, situé plus au nord, et, assemblant son conseil de gentilshommes, il leur demanda leur avis sur ce qu’il convenait de faire. Le conseil émit l’opinion qu’il fallait à tout prix, par ruse ou séduction, prendre des gens du pays. La fortune favorisa le brave chevalier. Le roi de l’île, Guadarfia, se mit en relation avec lui, et jura obéissance, comme ami, non comme sujet. Jean de Béthencourt fit construire un chastel, ou mieux un fort, dans la prairie sud-ouest de l’île, y laissa quelques hommes sous le commandement de Berthin de Berneval, homme de bonne diligence, et il partit avec le reste de sa troupe pour conquérir l’île d’Erbanie, qui n’est autre que Fortaventure.

Gadifer conseilla d’opérer un débarquement de nuit, ce qui fut fait ; puis il prit le commandement d’une petite troupe d’hommes, et, pendant huit jours, il courut l’île sans pouvoir rencontrer un seul de ses habitants, qui s’étaient réfugiés dans les montagnes. Gadifer,